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Protection des données : un risque réel, mais à quelle échelle ?

L’usage d’outils et de technologies toujours plus performants est en croissance spectaculaire. L’e- et le…
Publié le 19 mars 2017
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L’usage d’outils et de technologies toujours plus performants est en croissance spectaculaire. L’e- et le m-commerce prennent un vrai essor. Les réseaux sociaux ne cessent de gagner en influence et importance. On constate, enfin, une explosion des objets connectés. Ensemble, ces tendances du 21e siècle soulèvent pourtant maintes questions sur la collecte, l’usage, le partage, la valorisation et la protection des données.
De telles questions sont importantes pour une grande variété de ‘publics’. Les consommateurs qui souhaitent maitriser au maximum ce que les entreprises savent d’eux, les entreprises qui doivent identifier le seuil à ne pas dépasser pour que leurs actions commerciales ne soient pas perçues comme intrusives, et enfin, les pouvoirs publics désireux de trouver un compromis entre la protection de l’individu et le nécessaire progrès économique. Il est clair que la collecte et l’usage des données représente donc un enjeu majeur du monde digital actuel.

Les chiffres ne se démentent pas : les consommateurs sont clairement préoccupés par la manière dont les organisations collectent des données sur eux et les utilisent. Déjà, en 2014, presque 84% des français se disaient inquiets de la captation de leurs données. Et pourtant, ils sont de plus en plus nombreux à utiliser des outils ou technologies qui multiplient les risques de captation : smartphones, réseaux sociaux, montres connectées et autres capteurs intelligents. Il existe ainsi, chez de nombreuses personnes, un dilemme majeur opposant le désir de partage, de reconnaissance et de personnalisation d’une part et le besoin de protection de leurs données d’autre part.

Toujours en 2014, une enquête menée par Orange montrait que 78% des individus avaient du mal à faire confiance aux entreprises qui se servent des données sur leurs utilisateurs. Le même pourcentage estimait que les fournisseurs de services avaient trop de renseignements sur les comportements et préférences des usagers. Ces inquiétudes croissantes ne sont pas sans conséquence. Ainsi, près de 90% des internautes américains indiquent éviter tout site dont ils pensent qu’il ne garantit pas une protection suffisante des données. Par ailleurs, les consommateurs, davantage conscients de la valeur de leurs données sont également de plus en plus nombreux à rechercher des opportunités de capitaliser eux-mêmes sur cette valeur.

Une très forte majorité de consommateurs estiment en effet qu’ils ne tirent pas encore assez profit du partage de leurs données personnelles. Globalement, les individus ont l’impression que l’entreprise retire une réelle valeur de ces données, valeur qui ne leur est pas du tout ou insuffisamment restituée.

Même si nous sommes globalement de plus en plus enclins à fournir nos données en échange de services gratuits ou à forte valeur ajoutée, cela ne signifie pas pour autant que l’usage des données fournies soit exempt d’implications en matière de protection. Le fait que le consommateur ait donné son consentement à un usage précis des données ne signifie pas qu’il ait consenti à tout usage possible ni qu’il ait définitivement renoncé à une garantie d’anonymat ou de confidentialité. Les attentes en termes de transparence et de responsabilité sont donc très fortes. D’autant que les risques d’utilisation détournée des données sont réels, mais restent très difficiles à quantifier. D’où la difficulté de faire des choix réellement éclairés.

Pour l’entreprise, au-delà du risque légal, il existe un risque réel pour la réputation ou l’image de marque en cas de pratique jugée abusive ou intrusive. Des travaux récents montrent que certains modèles publicitaires, pourtant considérés comme particulièrement efficaces, ont leurs limites. Ainsi, la personnalisation à l’extrême notamment à travers le ‘retargeting’ (technique consistant à proposer des bandeaux publicitaires en lien avec les comportements de navigation) peut être vécue comme très intrusive et conduire ainsi à des comportements de rejet.

Malgré des performances avérées, le Big Data et les modèles publicitaires qui y sont associés (dont le ‘retargeting’) posent donc des questions cruciales quant à leur impact réel sur la relation du client au site. Un bon nombre d’acheteurs en ligne et utilisateurs des réseaux sociaux craignent que leurs données soient utilisées à des fins publicitaires. Globalement, 82% des individus se disent gênés par l’utilisation de leurs données personnelles à des fins publicitaires (Enquête ACSEL – caisse des Dépôts de 2013).

Le respect de la vie privée reste un des enjeux majeurs de notre décennie. Le défi principal pour les acteurs du digital est donc de créer une relation de confiance avec les internautes et d’utiliser le Big Data pour développer de nouveaux services afin de partager la valeur ainsi créée avec l’ensemble des parties prenantes, y compris les internautes eux-mêmes. Ce n’est qu’à ces conditions que le Big Data dégagera tout son utilité économique mais aussi sociale.

 

Caroline Lancelot Miltgen
Professeur Associée en Marketing
AUDENCIA Business School

A propos de Caroline Lancelot Miltgen

Caroline Lancelot Miltgen est Professeur Associée en Marketing. Lauréate de deux Prix de Thèse ainsi qu’un IBM Faculty Award, elle a été Responsable Scientifique de deux contrats de recherche pour la Commission Européenne sur ‘vie privée et systèmes d’identification électronique’ et ‘vie privée et management de données personnelles’. Elle s’intéresse à l’impact des technologies sur les usages, avec un focus sur le management des données et la privacy.
clancelot@audencia.com

A propos d’Audencia Business School

Fondée en 1900, Audencia Business School se positionne parmi les meilleures Ecoles de Management européennes. Régulièrement classée dans les premiers rangs mondiaux par le Financial Times, elle est accréditée EQUIS, AACSB et AMBA. Ainsi, Audencia fait partie du cercle très fermé des Business Schools détenant cette triple accréditation dans le monde. Première Ecole de Management en France à adhérer à l’initiative Global Compact des Nations Unies, également signataire de leurs Principles of Responsible Management Education, Audencia s’est très tôt engagée à former et guider dans leur développement de futurs managers et entrepreneurs responsables. Audencia propose des programmes en management et en communication allant du bachelor au doctorat. Elle a signé des accords avec plus de 236 institutions académiques à l’étranger, et plus de 160 entreprises nationales et internationales. Elle accueille environ 4 500 étudiants, dispose d’un corps professoral de près de 120 enseignants-chercheurs et d’un réseau de plus de 22 000 diplômés.
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