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Véronique Richard, directrice du CELSA Paris-Sorbonne

Professeur des universités, elle est depuis 2004 directrice du CELSA, grande école en sciences de…
Publié le 22 octobre 2011
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Professeur des universités, elle est depuis 2004 directrice du CELSA, grande école en sciences de l’information et de la communication, rattachée à l’Université Paris-Sorbonne, qui dispense des formations professionnalisantes de haut niveau en journalisme, communication, marketing, publicité et ressources humaines. Responsable du département Ressources humaines pendant plus de 10 ans, ses recherches se situent aux croisements de l’éthique, la communication et le management.

CGE : Vous dirigez le CELSA depuis 2004 et menez des activités de recherche et d’enseignement dans de nombreux domaines liés aux sciences humaines et sociales. Quelles passerelles et quelles synergies pourriez-vous souligner entre les fondamentaux de vos recherches, la pédagogie de vos enseignements et la stratégie managériale de votre établissement en matière de SHS ?

V.R. : Il y a en effet dans mon parcours une conjonction de facteurs, d’opportunités et d’événements qui m’ont portée vers la direction du CELSA et ont contribué à forger une certaine vision de ce que doit et peut apporter notre école ; elle m’a aussi inspirée une certaine approche de la stratégie à mettre en œuvre pour mener à bien nos missions et nos projets. Nul doute que l’appui sur les sciences humaines et sociales et sur les sciences de l’information et de la communication en particulier ait joué un rôle essentiel dans ma façon d’aborder les orientations stratégiques et managériales.
Je remonterai volontiers à mes études en Sorbonne et à l’Ecole du Louvre pour me souvenir des leçons inoubliables de plusieurs grands maîtres comme Pierre Brunel ou Christiane Desroches Noblecourt qui m’ont profondément marquée ; ces deux univers de profonde culture et d’intense densité intellectuelle m’ont conduite par reconnaissance et fidélité à intégrer l’une des composantes de l’Université, le CELSA, au tout début de ma carrière. J’y ai trouvé une communauté ouverte, faite de liens entre des acteurs d’horizons diversifiés, universitaires, professionnels, représentants des médias, syndicalistes, étudiants, créant par leur rencontre un pont entre des univers non pas exclusifs mais liés.
J’ai aussi eu la chance d’avoir eu un parcours atypique, puisque j’ai, au sein de l’école, exercé tout d’abord des fonctions administratives comme responsable de la formation continue puis en faisant fonction de secrétaire général avant d’entamer une carrière d’enseignant-chercheur qualifiée en sciences de l’information et de la communication. Ces différentes et souvent concomitantes fonctions m’ont encouragée à porter attention aux différentes dimensions de la fonction managériale : humaine, universitaire, organisationnelle, institutionnelle, budgétaire…
L’atypie qui caractérise ma carrière trouve sans doute sa ligne directrice dans les problématiques de recherche et les enseignements que j’ai pu dispenser sur la communication managériale et organisationnelle et l’éthique dans les relations de travail. Ces thématiques entrecroisent plusieurs disciplines en sciences humaines : sociologie des organisations, ethnologie, sémiologie, philosophie, mises en perspective sous l’angle communicationnel. Elles m’incitent à analyser les logiques d’acteur et à définir des principes et des pratiques de coopération fondés sur l’écoute et la prise en compte de points de vue divers.
Persuadée que les sciences humaines et sociales et les sciences de l’information et de la communication constituent une dynamique vive permettant d’éclairer et d’accompagner les mutations sociales, technologiques ou économiques, souvent inattendues et violentes du monde actuel, je défends le modèle agile qu’est le CELSA, son positionnement et sa posture.

CGE : La place des femmes dans les entreprises ou dans les institutions est souvent en question dans notre société actuelle. On parle de quota, de parité, d’équité et de plus en plus du fameux plafond de verre, expression apparue aux États-Unis à la fin des années 70 pour désigner le fait que, dans une structure hiérarchique, les niveaux supérieurs ne sont pas accessibles à certaines catégories de personnes. Quel est votre point de vue sur cette situation et de manière générale quels sont, selon vous, les meilleurs leviers pour évoluer en la matière ?

V.R. : Les métiers auxquels nous préparons en communication, en ressources humaines, en marketing, en publicité, en journalisme se sont, comme beaucoup d’autres métiers, très largement ouverts aux femmes, suscitant de nombreuses candidatures féminines. Nous sommes d’autant plus sensibles à l’insertion des jeunes étudiantes de ces filières et à leur parcours que la féminisation des métiers est souvent vue comme une possible dévalorisation et qu’en période de crise les conditions d’accès à l’emploi (durée de recherche, niveau de rémunération et nature des contrats) sont moins favorables pour les jeunes diplômées que pour leurs collègues masculins. De plus, le déroulement de carrière des femmes, dans nos métiers comme dans d’autres, connaît des ralentissements – souvent au motif des maternités – voire des arrêts plus fréquents et plus précoces que celui de leurs collègues masculins.
Ces phénomènes récurrents sont largement médiatisés et ont fait l’objet de nombreux débats. Tout un arsenal de mesures réglementaires ou incitatives ont été prises, dont les effets, encore assez peu perceptibles, devraient se mesurer sur le moyen terme.
Parallèlement, le rôle éducatif que nous avons à jouer est essentiel. Sur le plan de l’enseignement et de la recherche, en transmettant des éléments de connaissances statistiques, sociologiques, économiques, en développant des études de cas, en favorisant des recherches, en initiant des débats sur la place des femmes dans les entreprises ou dans les institutions, nous développons les questionnements et nous suscitons des réflexions qui pourront être relayées et propices à l’action.
Nous avons aussi un rôle pour préparer et accompagner l’après-enseignement des étudiants comme des étudiantes : toutes les mesures prises par nos écoles pour favoriser leur insertion (ateliers de recrutement, forums, rencontres avec des professionnels) et suivre leurs carrières (constitution de réseaux, rencontres entre anciens et juniors, actions de formation continue) y contribuent.
L’exemplarité ici comme dans d’autres domaines est vertueuse et les témoignages de succès et de partage peuvent apporter confiance et donner de l’élan.

CGE : Les questions de la diversité, de l’ouverture aux étudiants internationaux et du développement de « stratégies durables » notamment, sont au cœur des problématiques des grandes écoles. Comment œuvrez-vous au CELSA pour répondre à ces enjeux ?

V.R. : Je dirai que quasiment génétiquement le CELSA a toujours eu, du fait de ses objectifs initiaux (former des littéraires pour les métiers de l’entreprise) et de son ancrage dans les sciences et les métiers de l’information et de la communication (discipline transversale), la volonté d’être une communauté ouverte, soucieuse d’accueillir des publics diversifiés venant d’horizons et de formations différents. Les modalités d’accès et la structuration des études (entrée à plusieurs niveaux) sont pensées pour favoriser la mobilité et les passerelles entre domaines différents.
Depuis plusieurs années, mondialisation, évolution des aspirations des jeunes, mesures incitatives pour faciliter les échanges accentuent notre responsabilité et amplifient les dispositifs d’accueil.
Ainsi, à l’instar de nombreux autres établissements, pour favoriser l’ouverture sociale et la diversité, nous avons mis en place ces dernières années de nouveaux dispositifs d’information (site web, salons, visites, mobilisation de nos étudiants) ; nous avons fait évoluer nos concours, ouvert plusieurs de nos cursus de master 2 en apprentissage ; nous avons déployé notre offre de formation sur de nouvelles spécialités et noué des partenariats avec d’autres écoles (EMA, ENA, ENSCI, Université de Paris 6…).
Quant à l’ouverture internationale, elle a été fortement encouragée là encore par le développement des partenariats initiés par les chercheurs de l’école et les possibilités de valider des périodes de formation ou de stage à l’étranger (semestre ou année de césure).
Notre discipline et les métiers auxquels nous formons ne peuvent se penser sur des territoires fermés.

CGE : Le CELSA est souvent qualifié d’OVNI dans le monde universitaire, mais à y regarder de plus près, une de vos principales qualités est de former des étudiants venus de tous les horizons, en maintenant une belle alchimie dans vos cursus, un juste équilibre dans vos promotions et une parfaite adaptabilité aux attentes du marché du travail. Quels sont les secrets de cette stratégie et de cette réussite ?

V.R. : J’entends votre question comme une appréciation très positive de l’action que nous menons et j’en suis très honorée. Je nuancerai avec prudence en disant que l’alchimie et l’équilibre dont vous parlez sont un objectif constant et qui doit sans cesse être mis en avant. C’est une visée plus qu’un acquis.
Cependant il est vrai que nous souhaitons l’équilibre et la « fertilisation croisée » entre enseignements théoriques, professionnels et méthodologiques. Les programmes sont toujours ternaires. Nous mobilisons en ce sens un corps enseignant diversifié : nos titulaires, nos associés et de nombreux professionnels experts en leurs domaines œuvrent ensemble et en concertation. Parler de synergie entre enseignement et recherche et entre universitaires et professionnels n’est pas un vain mot : c’est une visée constante.
Nos instances, conseils d’administration, scientifique, conseils de spécialités, commissions pédagogiques et service d’observatoire des métiers sont constitués et réunis pour permettre la mutualisation et l’actualisation des connaissances et des programmes.
La construction de nos cursus reflète cet objectif. Il y a une progression entre l’année de licence 3 (après deux années validées dans d’autres établissements variés) qui vise à consolider la culture générale et à initier à une grappe de métiers, l’année de master 1 qui permet d’amorcer la professionnalisation tout en consolidant les bases théoriques et l’année de master 2 qui permet une spécialisation dans un domaine. Le juste équilibre se situe entre expertise et adaptabilité.
Les études doctorales et l’activité de recherche ont également cette double visée de formation théorique et appliquée à des terrains et des objets qui questionnent l’évolution de nos sociétés.

CGE : Si vous aviez le pouvoir, et peut-être l’avez-vous ?…, de traduire et de transmettre dans la société le socle de culture générale et d’humanisme de votre établissement pour qu’il rayonne et profite à tout un chacun, telle une force irrésistible bienfaisante, comment imagineriez-vous sa propagation et quelles en seraient les vertus ?

V.R. : Je ne peux certainement pas répondre seule à cette question. Il faudrait ici faire témoigner nos instances de tutelle, notre université, et la communauté « ouverte » qui constitue le CELSA en particulier les élèves, les enseignants, les administratifs, les professionnels, les chercheurs d’autres universités qui nous côtoient, travaillent avec nous et pourraient témoigner de cette « propagation ».
S’il y a un esprit CELSA, je pense qu’il réside dans une dynamique portée par des visées d’ouverture, de rigueur, d’innovation et d’humanisme.
Je croise en de multiples occasions des « celsiens » qui portent ces valeurs et savent et sauront les transmettre.

 

Créé en 1957 au sein de la Faculté des Lettres de Paris, pour favoriser l’insertion professionnelle des littéraires, le CELSA est devenu une Grande Ecole rattachée à l’Université de Paris-Sorbonne spécialisée dans la recherche et la formation en information et communication. L’École mène une activité de veille scientifique et dispense des formations professionnalisantes de haut niveau en journalisme, communication, marketing, publicité et ressources humaines. Elle conduit aux diplômes de licence, master professionnel, master recherche, mastère spécialisé, doctorat, magistère et MBA. Les formations s’adressent aux étudiants (formation initiale) comme aux professionnels (formation continue).

Attaché à la synergie entre monde universitaire et monde socio-économique, le CELSA entend aussi inscrire ses activités de recherche et d’enseignement de plus en plus à l’international et développe ses partenariats avec différents établissements en France et à l’étranger.

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