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15 % seulement  de femmes dirigeantes de Grandes écoles : à ce rythme nous atteindrons la parité en 2060 !

Dans le cadre du 4ème séminaire de l’AFDESRI (Association pour les femmes dirigeantes de l’enseignement…
Publié le 24 avril 2019
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Dans le cadre du 4ème séminaire de l’AFDESRI (Association pour les femmes dirigeantes de l’enseignement supérieur, de la recherche et innovation), Anne-Lucie Wack, présidente de la Conférence des grandes écoles et directrice générale de Montpellier SupAgro, devait traiter la question posée par l’AFDESRI  « Comment devient-on numéro une de grande école » ? Pour y répondre, Anne-Lucie Wack a mené une enquête flash auprès des femmes  actuellement dirigeantes de Grandes écoles.  Voici le contenu de son intervention.  

Voir la présentation ppt d’Anne-Lucie Wack

Intervention de Anne-Lucie Wack, présidente de la CGE, au séminaire de l’ AFDESRI  (18 janvier 2019)

Comment devient-on numéro une de Grande école ?
« Aujourd’hui on compte seulement 33 femmes en position de numéro une sur les 214 Grandes écoles françaises membres de la CGE*, soit 15% du nombre de dirigeants des écoles, toutes spécialités confondues; ce sont des écoles d’ingénieur, de management, sciences po, architecture, vétérinaires, ou d’autres spécialités,  qui sont publiques (60 %  des écoles de la CGE) ou privées.

Cette sous-représentation des femmes en position de leadership n’est pas spécifique aux grandes écoles, on retrouve un pourcentage similaire à celui constaté dans d’autres sphères publiques ou privées, notamment le pourcentage de femmes présidentes d’université.

Si l’on considère le rythme de progression des dernières années au sein des écoles de la CGE -même si l’extrapolation est délicate –  on atteindra la parité dans 40 ans, c’est-à- dire en en 2060 !

Pour répondre à la question posée par l’AFDESRI j’ai interrogé ces femmes « numéro une » de grandes écoles par un court questionnaire, pour recueillir à la fois leur vision sur leur parcours et mais aussi leurs recommandations pour améliorer la présence des femmes à la tête des grandes écoles.

En trois jours de délai, 26 femmes sur les 33 ont répondu aux 7 questions, conçues pour des réponses à cocher en mode réflexe, avec des zones de commentaires et libre expression. En première approche,  voici ce que nous pouvons retenir, sachant que les réponses mériteront une analyse plus poussée :

  • Seule la moitié des femmes DG de grandes écoles estime que le parcours d’accession au poste de n°1 a été difficile
  • 70% d’entre-elles pensent que le fait d’être une femme – plutôt qu’un homme – n’a pas eu d’impact. 30% seulement estiment que le fait d’être une femme a rendu l’accession à ces fonctions de numéro une plus difficile
  • Mais 50% pensent que le fait d’être une femme -plutôt qu’un homme – rend l’exercice de la fonction plus difficile. Le sentiment de devoir davantage faire leurs preuves, à compétences égales, revient de façon récurrente dans les commentaires
  • 70% estiment ne pas faire l’objet de discrimination – mais 16% estiment l’être, avec des témoignages étayés.

Pour ma part j’ai été étonnée par les résultats aux 4 premières questions : je m’attendais à plus de difficultés et de discriminations ressenties, au regard des 15% seulement de femmes dirigeantes de Grandes écoles, soit une minorité de femmes dans un monde marqué par un leadership très masculin.  Je me suis alors demandé s’il y avait une certaine forme de déni de ces femmes n°1 ? Ou bien si l’on pouvait déduire de ces résultats que l’écosystème des Grandes écoles protège d’une certaine façon contre les discriminations ?  Mais dans ce cas pourquoi y a-t-il seulement 15% de femmes dirigeantes de Grandes écoles ? 

C’est là qu’il est intéressant d’examiner les réponses apportées par les femmes DG de grandes écoles aux 3 questions suivantes  du questionnaire que je leur avais envoyé :  

  • Les femmes interrogées estiment que le principal obstacle à la position de numéro une est  l’auto censure ; elles citent en deuxième  position le  manque de vivier  et en troisième le manque de motivation. Sur le manque de vivier, je soulignerai que, même dans  les domaines où existent de longue date des viviers en termes de proportion de femmes formées dans ces domaines (comme dans les écoles de management ou les écoles d’ingénieurs agro), les femmes sont également sous-représentées aux positions de DG. Ainsi on compte  20 % de femmes DG d’écoles de management. Et dans les écoles d’ingénieurs agro je suis la 1ère et seule femme DG, alors que ces écoles sont très anciennes (crées en 1820) et de longue date très féminisées (avec près de 70% de femmes dans les effectifs étudiants actuels, et plus de 50 % depuis une trentaine d’années).
  • A la question « Sur quels leviers peut-on agir pour augmenter le nombre de femmes DG ? »  les femmes interrogées répondent : 1° l’incitation à candidater dans les appels à candidatures,  et 2° La formation au leadership. Elles se déclarent par ailleurs majoritairement opposées à la discrimination positive, sur la base de l’argument qu’elles ne souhaitent pas qu’on puisse dire qu’une femme ayant accédé à ces fonctions n’a pas été choisie pour ses compétences. Sur ce point je voudrais rappeler une question évoquée lors de précédents séminaires AFDESRI, et plus récemment, lors d’une audition sur ce sujet à l’Assemblée Nationale par Cédric Villani : qu’est ce qui est le plus injuste, laisser perdurer la situation actuelle, ou appliquer une politique plus volontariste pour faire évoluer la situation ?
  • Enfin, à la question « Quel est le Principal facteur qui vous a permis de devenir n°1 ? «  les femmes DG répondent 1° les compétences, et 2° la motivation.

Je n’aurai pas le temps ici de rappeler toutes les actions que la Conférence des grandes écoles conduit sur l’égalité femmes-hommes, avec ses baromètres dédiés et ses actions de sensibilisation menées notamment au niveau de la population étudiante dans les Grandes écoles, mais je voudrais conclure sur deux réflexions que cette étude m’inspire :

  • Un réel intérêt à faire vivre ce groupe des 33 femmes numéro une de Grandes écoles, pour aller plus loin dans l’analyse, et à inciter certaines d’entre elles à devenir mentors, en lien avec les actions de l’AFDESRI. Mais je voudrais insister sur la nécessité d’intégrer des hommes dans cette dynamique, comme je l’avais présenté lors d’un précédent séminaire AFDESRI, sur la base du programme international AWARD de la fondation Gates, pour favoriser le leadership de femmes scientifiques, programme impliquant une proportion égale de mentors masculins ou féminins.
  • Le fait que ces 33 femmes numéro une de Grandes écoles sont de fait passées « au travers des mailles du filet » ou « des trous de la raquette », et qu’il y avait forcément quelque chose de paradoxal à les interroger puisqu’elles ont réussi – c’est en tout cas la réflexion qui m’est venue en rédigeant le questionnaire- et donc :
  • soit, elles n’ont effectivement pas rencontré ou ressenti d’obstacles;
  • soit elles ont réussi à les surmonter, par leur détermination et une conjonction de facteurs favorables dont celles qui ont échoué n’auraient pas bénéficié.

Sans doute faudrait-il interroger celles qui n’ont pas réussi ou éprouvent de réelles difficultés, mais elles sont forcément plus difficiles à identifier.

Je vous remercie pour votre attention.

* 227 Grandes écoles au total dont 13 étrangères et 214 françaises

 

 

 

 

 

 

 

 

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