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Un cocktail « extra-ordinaire »

Texte du TEDx sur le plaidoyer en faveur de la création d’un statut international d’étudiant…
Publié le 24 novembre 2020
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Texte du TEDx sur le plaidoyer en faveur de la création d’un statut international d’étudiant en situation de handicap porté par la CGE en association avec la Fédéeh et Unirh Thransition (anciennement Hanploi CED).

La vidéo du TED X est à retrouver sur ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=vGq-jgy0Mbw

Xavier Quernin, 6 mars 2019

 

Bonsoir,

Aujourd’hui j’ai envie de vous parler d’un cocktail. Un cocktail extra-ordinaire.

Un cocktail extra-ordinaire que chacun d’entre-vous ait pu boire.

Un cocktail extra-ordinaire par des parfums, des saveurs que vous découvriez pour la première fois.

Un cocktail extra-ordinaire par la magie du lieu dans lequel vous le dégustiez.

Un cocktail extra-ordinaire, par les personnes qui vous entouraient, récemment rencontrées, avec qui vous commenciez à tisser des liens.

Ce souvenir vous fait peut-être voyager vers un autre pays, vers un autre continent.

C’était un cocktail que vous trouviez « extra-ordinaire » parce que vous vous sentiez bien,

Dans un lieu que vous découvriez,

Avec des personnes qui parlaient une langue différente, que vous maitrisiez difficilement.

Mais vous étiez bien car vous aviez le sentiment de partager quelque chose de nouveau, d’incroyable, d’unique dans votre vie, avec des jeunes de votre âge qui vivaient peut-être la même expérience ou qui vous invitaient à découvrir leur culture, leurs passions, leurs vies.

Ces jeunes, c’étaient sans doute des étudiants, tout comme vous.

Ils vous accueillaient dans leur université, sur leur campus, chez eux.

Ou sinon étaient-ce comme vous des expatriés d’un semestre, venus d’un autre pays.

Vous étiez bien, vous croquiez à pleines dents cette expérience de vie qui vous était offerte dans le cadre de votre parcours de formation.

Chaque année plusieurs millions d’étudiants vivent ces rencontres uniques, à travers le monde.

Chaque année plusieurs millions d’étudiants prennent ce cocktail « extra-ordinaire » .

Aujourd’hui j’ai envie de vous parler des ceux qui doivent se battre pour essayer de trinquer avec vous.

 

Ainsi, Pierre aura du mal à prendre ce cocktail avec vous.

En effet, toutes ses économies qu’il aurait apprécié consacrer à la découverte du Mexique passeront dans le financement des soins médicaux dont il a besoin chaque semaine.

Sa caisse d’assurance ne couvre pas les frais dans des pays qui n’ont pas d’accord bilatéral avec la France. Et aucune assurance privée ne remboursera ces dépenses médicales, déjà prévues.

 

Vous ne retrouverez pas non plus Sarah.

Non-voyante, elle rêvait depuis longtemps de réaliser un stage en Angleterre.

Mais en dehors de son temps passé en entreprise elle a des difficultés à se construire un réseau social : elle a du mal à trouver des conseils sur des associations sportives ou artistiques accessibles. De plus, son chien guide étant déstabilisé par la circulation à gauche, les déplacements dans son quartier sont compliqués.

 

Si vous prenez ce cocktail sur un autre continent, vous ne croiserez pas non-plus Guillaume.

Tout simplement car il n’aura pas pu aller aussi loin de chez lui.

Devant récupérer des traitements régulièrement en France, il a dû choisir une destination dans un pays limitrophe pour réduire ses couts.

Certains traitements sont rarement délivrés pour un semestre.

 

Emma n’aura pas pu se rendre à la soirée que vous organisez dans ce bar typique :

En effet, les transports en commun sont peu accessibles et ceux qui sont adaptés sont trop chers.

 

Ils sont nombreux ces étudiants qui n’auront pas pu choisir la destination de leur rêve, ni même partir à l’étranger, à cause de surcouts excessifs, de manques de renseignements ou de dispositifs permettant le maintien des aides et de l’accompagnement.

Dans les universités ou les entreprises qui les accueillent, ces étudiants rencontrent rarement de difficultés quant à leurs demandes d’aménagements. Il y a eu de réelles avancées.

Les problèmes qui persistent concernent l’accès à la vie quotidienne, à la vie sociale, aux transports et aux soins.

 

Depuis bientôt 9 ans j’ai pour mission de soutenir les étudiants en situation de handicap dans la réussite de leurs études et leur épanouissement dans la vie sociale du campus.

Un job passionnant, auquel je suis très attaché, qui m’invite à m’engager toujours plus pour ces étudiants, afin qu’ils n’aient uniquement à penser à leurs études, et non à l’organisation de leurs aménagements et accompagnements.

Chaque année je reçois en entretien des étudiants qui ont une situation qui leur est propre, qui nécessite des conseils spécifiques.

Ce job, et cette ambition pour ces étudiants, nous sommes des centaines à les partager en France, et bien plus dans le monde.

Avec mes homologues des grandes écoles et des universités, nous travaillons ensemble pour trouver des solutions à des problématiques communes rencontrées par ces étudiants.

Il y a bientôt deux ans, nous nous sommes engagés à trouver une solution à l’une des plus grandes d’entre elles : l’accessibilité de la mobilité internationale.

 

Alors oui, devant nous s’ouvrait un océan.  Une étendue de défis qui paraissaient insurmontables, mais un horizon qui nous semblait prometteur.

Il y a des lois et des conventions, nationales ou internationales. Une convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées mentionne dans ses articles la garantie d’accès à l’Autonomie , à  la Mobilité,  à l’Education, à la Santé , et à la vie culturelle, récréative et sportive.

Trois associations ont décidé de proposer une application concrète de cette convention, à destination des étudiants handicapés.

Ensemble, elles portent depuis deux ans un plaidoyer en faveur de la création d’un Statut International d’Etudiant en Situation de Handicap.

Nous ne demandons pas de nouveaux droits pour ces étudiants.

Simplement l’application de ceux mentionnés dans ces textes.

 

Nous invitons donc chaque pays à nommer un référent handicap dans les ambassades.

Celui-ci donnera des conseils sur les entreprises d’aide à domicile et sur les associations sportives ou culturelles accessibles. Il sera une véritable ressource pour tout ressortissant en situation de handicap souhaitant découvrir ce pays.

 

Nous demandons la création d’un bagage supplémentaire gratuit dans les avions, pour faciliter le transport de matériel adapté ou de médicaments.

 

Nous souhaitons que les médicaments puissent être délivrés pour la durée entière du séjour, ou, s’ils sont disponibles dans le pays d’accueil, que leur remboursement soit maintenu par la caisse d’assurance d’origine de l’étudiant.

Tout comme le remboursement des soins : nous souhaitons que le statut vaille d’accord bilatéral entre le pays d’origine et le pays d’accueil.

 

Partout dans le monde des modes de transports adaptés se développent.

Dans certains pays d’Asie nous voyons même des « tuk-tuk » adaptés pour accueillir des personnes en fauteuil roulant.

Comment pouvons-nous admettre que ces étudiants ne puissent en bénéficier à des tarifs raisonnables ?

 

Tout ces droits seraient rappelés dans un document administratif international unique.

 

Devant nous, un océan.

Mais aujourd’hui nous apercevons la terre !

La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, et le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées, nous ont encouragé à porter cette idée dans le cadre de l’Examen Périodique Universel de la France de janvier 2018.

La contribution que nous avons alors écrite a été présentée à différents ministères, à des parlementaires et à la Présidence de la République Française.

A un niveau international, la Rapporteur spéciale pour des droits des Personnes Handicapées de l’ONU et le Spécialiste Handicap de l’Organisation Internationale du Travail, ont également montré leur intérêt à ce projet.

Aujourd’hui, l’ONU attend qu’un Etat Partie se saisisse de ce projet et le porte au niveau de ses instances.

En octobre dernier, lors d’un colloque international, la Secrétaire d’Etat chargée des Personnes Handicapées encourageait les pays représentés à se saisir de ce sujet avec la France.

 

En moins de deux ans nous avons entrepris un plaidoyer inimaginable.

Cette idée qui pouvait paraitre folle par son ambition hors norme a été accueillie favorablement par ces instances nationales et internationales.

Nous en sommes fiers, mais surtout nous sommes fiers de ces étudiants que nous accompagnons, qui, par leur persévérance, nous encouragent à déplacer ces montagnes.

 

Alors, ce soir, l’espoir, l’espérance que je voulais vous partager est tout simplement l’envie de vous entendre un jour me raconter le souvenir de votre cocktail le plus « extra-ordinaire » que vous aurez pris avec vos amis, y compris Pierre, Sarah, Guillaume et Emma.

Santé !

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