Accueil 5 A la une 5 9e conférence des stages

9e conférence des stages

Publié le 2 février 2024
9e conférence des stages
Partager l'article avec votre réseau

9e conférence nationale des stages et autres actions de professionnalisation

L’impact des grandes transitions sur la professionnalisation des étudiants

 

Ce mardi 30 janvier 2024 se tenait à l’Académie du Climat, Paris, la 9e conférence nationale des stages et autres actions de professionnalisation, organisée par l’Association des Villes Universitaires de France (AVUF) avec la Conférence des grandes écoles (CGE), la Conférence des Directeurs des Ecoles Françaises d’Ingénieurs (CDEFI) et France Universités, en partenariat avec Universités & Territoires. 130 acteurs de l’insertion professionnelle, ainsi que de nombreux intervenants, étaient réunis pour échanger autour du thème de cette nouvelle édition : l’impact des grandes transitions sur la professionnalisation des étudiants.

Marie-Christine LEMARDELEY, adjointe à la maire de Paris en charge de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de la vie étudiante, a introduit cette journée avec un constat : « On assiste aujourd’hui à un déplacement des jeunes diplômés vers les métiers et secteurs dits de rupture » et de poursuivre : 

« l’ESR doit s’en saisir et inclure l’initiation aux questions d’urgence climatique afin de permettre à tous de bâtir des compétences pour innover dans les métiers à impact ».

Pierre LAMBLIN, directeur de l’Observatoire de l’APEC sur l’impact des transitions et nouvelles compétences, interrogeait les nouvelles trajectoires professionnelles induites par les grandes transitions. Il a rappelé que, malgré la conjoncture actuelle, compliquée et incertaine, et la faible croissance économique Française en 2023 qui devrait se poursuivre en 2024, le recrutement des cadres se maintient, mieux, il évolue.

En effet, les entreprises se réinventent dans leurs pratiques de recrutement, de management et de fidélisation des cadres jeunes diplômés, lesquels réclament de meilleures conditions de travail et, depuis la crise du covid, un équilibre vie personnelle / vie professionnelle plus concret.

Si de nouvelles compétences sont très recherchées, notamment dans le secteur du numérique avec l’essor de la réalité virtuelle et de l’intelligence artificielle, Pierre Lamblin préfère parler d’« une évolution des métiers plutôt que la création de nouveaux ».

A l’image de la transformation numérique opérée dans les années 2000 en France, la plupart des métiers cadres vont désormais être amenés à se transformer sous l’impact de la transition écologique. Selon le baromètre 2023 des métiers cadres publié par l’APEC, seuls 15 sur 450 concernaient la transition écologique mais, pour Pierre Lamblin, pas un seul ne va échapper à cette mutation. On parle alors de « verdissement » des métiers.

La première table ronde de la matinée était consacrée au regard des étudiants et animée par Isabelle SCHÖNINGER (CDEFI) et Virginie SEMENT (France Universités).

Les représentants étudiants Alexandre de ALMEIDA, président de la Confédération nationale des junior-entreprises (CNJE), Anna BIAUSQUE, présidente du Bureau national des élèves-ingénieurs (BNEI), Pauline BOUVEAU, présidente du Bureau national des étudiants en école de management (BNEM), Noé FERRÉ, vice-président du Réseau étudiant pour une société écologique et solidaire (RESES) et Edouard STEICHEN, président de l’Union nationale des étudiants en architecture et paysage (UNEAP), étaient interrogés sur la prise en compte des grandes transitions au sein de leur réseau associatif

« Une grosse attente de recontextualisation des enseignements »

Les étudiants réclament une plus grande intégration des transitions dans leurs enseignements, et ce pour les sujets écologiques, numériques ou encore sociétaux. Les représentants présents constatent de nombreux changements depuis la crise du covid. Les étudiants demandent notamment de nouveaux formats d’études ainsi qu’une meilleure intégration des établissements à leur territoire. Ils expriment également « une grosse attente de recontextualisation des enseignements, au regard des enjeux écologiques, mais aussi des transformations profondes qui touchent la société et le monde professionnel » selon Anna Biausque. Les étudiants considèrent que les écoles ne répondent pas à ces besoins et passent donc aujourd’hui par d’autres moyens de se former : stages, alternances ou césures.

Du côté des entreprises, les étudiants attendent qu’elles leur permettent de s’élever, aussi bien sur un plan financier (le salaire reste le premier critère dans le choix d’un emploi) que sur un plan personnel, en offrant par exemple des temps dédiés à leur engagement. Les représentants étudiants souhaitent que les entreprises soient de plus en plus ouvertes à la jeunesse et leur laissent la place pour insuffler eux-mêmes les changements attendus.

Enfin, tous s’accordent sur de nombreux points d’améliorations pour les établissements d’enseignement supérieur, dont développer l’alternance, construire les maquettes pédagogiques avec les étudiants, libérer plus de temps pour le parcours associatif et mieux intégrer les étudiants à la gouvernance.

Animée par Flora MAILLARD (AVUF) et Thomas BAUSARDO (CGE), la deuxième table ronde recueillait le regard des organismes d’accueil et employeurs. Les intervenants Laurence BRETON-KUENY, directrice des ressources humaines du groupe AFNOR et vice-présidente de l’ANDRH, Për-Erwan LESCOP, directeur adjoint des ressources humaines de Fujifilm France Medical Systems Business, Aurore MAYER, directrice du réseau Parité Un.e au sein de la Direction des ressources humaines du groupe La Poste, Caroline RENOUX, fondatrice et CEO du cabinet de recrutement Birdeo, spécialisé dans les nouveaux enjeux sociétaux et Catherine TROMBETTA, cheffe du Bureau de l’insertion professionnelle à la Direction des ressources humaines de la Ville de Paris, étaient interrogés sur les nouveaux profils des jeunes recrutés.

L’aspect qui revient le plus souvent dans la description des jeunes recrutés est leur implication, à tous les niveaux. En effet, les jeunes recrues ont envie de réussir, d’intégrer un collectif et de donner plus de sens à leur quotidien. Elles s’investissent aussi bien dans leur métier que dans des thématiques sociales et environnementales.

En entretien, les tendances de fond sont, dans un premier temps, une demande d’un meilleur équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle, mais aussi la dynamique et la cohésion du groupe. Le jeune recruté ose prendre la parole pour toutes les générations de l’entreprise sur des sujets tels que le télétravail, la flexibilité, le bien-être. Les deux prérequis qui restent fondamentaux pour les jeunes sont la rémunération (malgré des enquêtes qui tendent à dire l’inverse) et les conditions de travail. Ensuite seulement viennent le sens du métier et la mission des entreprises.

Du point de vue des métiers et des organisations l'intérêt croissant pour les enjeux liés à la responsabilité sociale et au développement durable remonte notamment à 2016, après les Accords de Paris et la COP21. En 2019, plusieurs phénomènes aboutissent à une explosion des sujets, des postes et de la professionnalisation de ces métiers, notamment la loi PACTE, la création de l’application YUKA, le Manifeste Pour un Réveil Ecologique, ou encore les grands incendies en Australie. Ainsi, en 2020, en pleine crise sanitaire du COVID-19, et pour la première fois, les budgets RSE qui sont habituellement les premiers coupés lors de crises majeures ne le sont pas. Ce qui débouche en 2022 à une pénurie sur ces compétences et ces métiers tant la demande est forte.

Pour les jeunes candidats, se former à la RSE permet d’avancer plus vite dans une carrière, selon Caroline Renoux :

« C’est aujourd’hui un must-have auquel tout le monde doit désormais se former. »

Hélène CLOÎTRE, co-présidente de l’association Séisme, dont les fondateurs avaient réalisé le film « Ruptures » qui dressait un portrait des jeunes étudiants en rupture avec les parcours d’insertion traditionnels, revenait sur le premier Forum Séisme ayant eu lieu à Rennes, en octobre 2023.

Selon elle, les étudiants souhaitent de plus en plus être formés aux enjeux environnementaux et estiment, pour la plupart, ne pas l’être suffisamment. Ils ne savent donc souvent pas par où commencer pour s’engager. C’est pourquoi le Forum Séisme, une alternative aux forums traditionnels, tourné vers l’orientation à impact positif, a connu un très grand succès dès sa première édition. Pensé par des jeunes et pour des jeunes, il a réuni plus de 100 structures vertueuses du territoire, 15 écoles et universités partenaires (dont les cours étaient banalisés pour permettre aux étudiants d’y assister) et 70 intervenants dans le but de faire découvrir aux jeunes les nombreuses manières concrètes de s’engager dans son métier.

Aujourd’hui, la vocation d’Hélène Cloître est de permettre à d’autres Forums Séisme d’ouvrir partout en France. Suite à son retour d’expérience, elle présentait un projet de déploiement national et proposait alors aux établissements d’organiser eux-mêmes l’évènement avec le soutien de l’association, ou bien de leur confier toute la coordination, contre une rémunération.

La dernière table ronde de la journée évoquait le regard des établissements et était animée par Quentin SANZ DE GALDEANO (CDEFI) et François RIO (AVUF). Les participants Véronique BONNET, directrice de l’ESME et vice-présidente de la commission Orientation et accompagnement des élèves de la CDEFI, Virginie LAVAL, présidente de l’université de Poitiers et présidente du Conseil Formation, Vie étudiante et Insertion professionnelle de France Universités et José MAILLET, responsable de Gaïa AUDENCIA qui représentait la CGE, étaient interrogés sur l’impact des grandes transitions sur l’offre de formation.

Si une partie des étudiants est très engagée et très demandeuse de pouvoir de s’engager, les intervenants soulignent que tous ne le sont pas pour autant. Les établissements ont encore une part de chemin à faire pour montrer l’exemple, et non pas proposer de l’engagement seulement en réaction aux attentes de la communauté étudiante. Dans les faits, il semble que les actions d’engagement soient d’abord proposées par l’établissement, avant d’être pérennisées par une association étudiante si le projet fonctionne.

Ces dernières années, la part des associations portant des enjeux sociétaux, écologiques et relatifs à la parité est en constante augmentation. Cela impacte la vie sur le campus mais aussi l’offre de formation qui doit désormais intégrer les enjeux de RSE. Pour les intervenants, le premier chantier est la formation des enseignants et des enseignants-chercheurs à ces enjeux : comment intégrer les sujets de transitions dans chaque cours ? comment développer l’apprentissage dans chaque formation ? comment rédiger un schéma directeur de ces enjeux et l’intégrer aux maquettes pédagogiques ?

La proposition des intervenants repose alors sur la transversalité et le décloisonnement des disciplines. Il faut apporter une réponse interdisciplinaire à toutes les questions des grandes transitions et être dans une approche systémique : la durabilité doit être au cœur de toutes les décisions. José Maillet illustrait ce propos en évoquant les primes versées par Audencia aux chercheurs qui choisissent un sujet transversal pour leurs recherches. Ce décloisonnement doit permettre d’éviter un décalage grandissant entre les attentes des étudiants et le monde professionnel : les entreprises attendent des diplômés davantage d’hybridation afin de parer aux manques dans certaines disciplines.

La raison d’être des établissements est justement de faire en sorte que ce décalage n’existe pas. Pour cela, ils peuvent s’appuyer sur le niveau d’engagement très important de leurs étudiants afin de donner du sens à leurs formations, sans quoi certains d’entre eux préféreront créer leur propre parcours de valeurs en dehors de l’école.

Partager l'article avec votre réseau
Loading...