Pour sa 10e édition, la Conférence nationale des stages et autres actions de professionnalisation, portée par l’Association des villes universitaires de France (AVUF) et coorganisée avec la Conférence des grandes écoles (CGE), la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) et France Universités, avait choisi pour thème l’entrepreneuriat étudiant.
L’ouverture de l’évènement par BPCE, qui l’accueillait dans ses locaux parisiens du 13e arrondissement, fut notamment l’occasion de rappeler tout son travail d’accompagnement financier des entrepreneurs de tous âges et de présenter en particulier ses nouveaux dispositifs destinés aux jeunes entrepreneurs.
Virginie Laval, présidente de l’Université de Poitiers et présidente du Conseil de la Formation, de la Vie étudiante et de l’Insertion professionnelle de France Universités, dans son propos introductif, insista pour sa part sur la place importante désormais occupée par l’entrepreneuriat étudiant dans les gouvernances et les stratégies des Universités, singulièrement depuis une dizaine d’années. Tout à la fois expérience professionnelle, aventure humaine et vecteur de créateur de valeur(s), l’entrepreneuriat étudiant est pleinement ancré dans la réalité des établissements et dans leurs missions d’insertion professionnelle de leurs apprenants.
La première intervention de la Conférence, par Patricia Champy Remoussenard, professeure en sciences de l’éducation et de la formation à l’Université de Lille et coordinatrice du récent ouvrage L’enseignement supérieur une fabrique d’entrepreneurs ? (Presses universitaires de la Méditerranée, 2024) fut consacrée à l’enjeu des compétences entrepreneuriales : leur pluralité, la multitude des contextes dans lesquelles elles peuvent s’acquérir, et leur utilité, que l’objectif soit ou non la création d’entreprise. L’occasion de souligner à quel point la formation à l’entrepreneuriat, et les compétences associées, peuvent bousculer et faire évoluer les professionnalités des personnels de l’ESR, et constituer un facteur de transformation des établissements d’enseignement.
La table ronde inaugurale avait pour ambition de poser les termes de ce qu’est, en 2025, l’entrepreneuriat étudiant. Romain Laffont, directeur de Polytech Marseille et du Pépite Provence et Pascale Brenet, directrice du Pépite Bourgogne Franche-Comté et présidente du réseau des VP Entrepreneuriat, profitèrent de leurs interventions pour présenter le continuum de l’entrepreneuriat et ses enjeux, de la sensibilisation à la création, dans les universités et les écoles d’ingénieurs. Pour les premières, l’influence de la construction du réseau des Pépite (Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat), présenté par Betty Teixeira, directrice du Clermont Auvergne Pépite, fut décisive. Pour les secondes, le référentiel d’accréditation de la CTI joue et continue de jouer un rôle important dans la structuration de l’entrepreneuriat dans les parcours d’ingénierie. Tous deux ont pu insister sur l’intérêt majeur manifesté par les entreprises pour les compétences développées dans les programmes d’entrepreneuriat des écoles et des universités. Les lieux de l’entrepreneuriat, incubateurs – destinés à la création de start-ups, et fablabs – lieux de création et de fabrication ouverts et partagés, furent évoqués par Sébastien Cauwet, directeur de l’IMT Starter et Dorothée Brette, responsable du réseau Fablabs de CY Cergy Paris Université. Alexie Robert, chargée d’études au CEREQ, présenta enfin les résultats d’une étude sur les effets de l’entrepreneuriat sur l’insertion professionnelle des étudiants, menée grâce aux données de l’enquête Générations, et qui devrait connaître une suite.
La parole fut ensuite donnée à trois étudiants entrepreneurs. Océane Tomietto, présidente de la Confédération nationale des Junior-Entreprises (CNJE) rappela tout d’abord l’importance du cadre et du soutien que les junior-entreprises peuvent apporter aux jeunes entrepreneurs tout autant que l’intérêt très fort des recruteurs pour l’expérience qu’ils développent en entreprenant. Nicolas Wiegele, ancien étudiant-entrepreneur et start-up manager au Village by CA et Marie Odile McKeeney, cofondatrice de la société H’ability, revirent ensuite sans fard sur leurs propres expériences, insistant tous deux sur l’importance fondamentale de prendre en considération l’enjeu de la santé mentale et de la gestion du stress pour les jeunes entrepreneurs, tout autant que sur la nécessité de développer (et de savoir s’entourer !) des compétences multiples : pour les ingénieurs des compétences managériales, et pour les managers, des compétences techniques.
Cédric Romeira, directeur du développement et des partenariats d’HEYME, partenaire de la Conférence, aborda enfin toutes les dimensions de la protection sociale des étudiants-entrepreneurs, en France et à l’étranger, en matière de santé, d’assurance et de prévoyance.
La première table ronde de l’après-midi s’intéressa aux coopérations locales au service des étudiants entreprenant sur leur territoire. Deux collectivités territoriales, Amiens Métropole et Plaine Commune partagèrent ainsi leurs initiatives, en particulier le « challenge Amiens Campus » pour la première, dédié à la création d’activités par les étudiants de l’agglomération, et l’incubateur développé par la seconde, qui met notamment à disposition des créateurs des moyens développés par les établissements d’enseignement supérieur et de recherche de Seine-Saint-Denis. Noémie Jolly, directrice adjointe du Pépite ETENA Alsace revint pour sa part sur les liens noués par son Pépite avec son territoire.
La dernière séquence de la journée fut dédiée aux expériences internationales de l’entrepreneuriat étudiant, notamment dans le cadre de la construction des alliances d’universités européennes, présentées par David Itier, chef du département de la stratégie de l’espace européen de l’ESR au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et du programme Erasmus+, détaillé par Morgane Praud, chargée de promotion et d’animation au pôle Enseignement supérieur de l’Agence.
Deux représentants d’alliances détaillèrent par ailleurs les logiques d’internationalisation de l’entrepreneuriat étudiant dans leurs établissements respectifs. Marie-Christine Bert, directrice des relations internationales et des partenariats entreprises de l’Ecole nationale des Ponts et Chaussée, qui représentait l’alliance EELISA (European Engineering Learning Innovation Science Alliance) souligna que l’entrepreneuriat avait représenté l’un des tous premiers sujets de coopération entre les membres de l’alliance. David Catinot, startup manager à ESTIA Entreprendre, évoqua le projet de mobilité entrepreneuriale en développement au sein de l’alliance EU4DUAL, réplique du dispositif mis en place au niveau de l’ESTIA et qui permet à des étudiants entrepreneurs d’aller travailler sur leur propre projet dans des incubateurs partenaires à l’étranger (Espagne et Finlande notamment), tout en proposant du mécénat de compétences sur place.
Tous les intervenants ont insisté sur le caractère profondément transformant de ces alliances, sur l’importance de leur assurer une pérennité financière, mais également d’embrasser le temps long pour évaluer leurs pleins effets, notamment en matière d’entrepreneuriat et d’innovation, domaine dans lequel les avancées s’obtiennent avec patience.