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Mixité dans les formations d’ingénieur.es, aller au-delà des chiffres – Témoignage de l’INSA Lyon

39 % femmes en formation à l’INSA Lyon : un pourcentage au-delà de la moyenne nationale…
Publié le 30 mars 2022
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39 % femmes en formation à l’INSA Lyon : un pourcentage au-delà de la moyenne nationale des écoles d’ingénieur.es toutes spécialités confondues. Que nous apprend ce chiffre et surtout comment passer de la mixité à l’égalité réelle ?

 

Un modèle social et d’enseignement favorable à la mixité 

Sans procédure parallèle ou autre affirmative action ciblant les candidatures de femmes, le processus de recrutement du Groupe INSA a permis une hausse progressive et significative du nombre de jeunes femmes admises en 1ère année. A l’INSA Lyon, le taux de femmes en 1ère année est passé de 32,5% en 2012-2013 à 47% en 2020-2021.

Avec un recrutement davantage axé sur le contrôle continu des dossiers scolaires et moins sur une performance unique, les candidatures des jeunes femmes sont en effet mieux classées que celles des candidats hommes, ceux-ci étant plus nombreux à présenter un dossier.

Plusieurs spécificités de l’école attirent également les jeunes femmes : l’offre de spécialités diverses, les filières internationales, les sections artistiques et de sport de haut niveau, la vie associative et la part des sciences humaines et sociales dans l’enseignement semblent jouer en faveur de cette dynamique. Surtout, le recrutement post-bac sans concours est un atout de taille quand les trajectoires genrées d’orientation en France se déterminent particulièrement à ce moment de la scolarité.

Ces chiffres sont aussi le reflet d’une politique volontariste et visible, comme le montre le renommage de 50 % des bâtiments du campus avec des noms de femmes scientifiques jusque-là préemptés à 90% par des noms d’hommes scientifiques. Cette politique se traduit concrètement par des programmes d’actions menées en direction du public amont et pilotés par l’Institut Gaston Berger, service dédié à la valorisation du modèle INSA (handicap, ouverture sociale, genre, responsabilité sociale, humanisme technique). Ainsi, les actions d’incitation à la poursuite d’études et à la découverte des métiers scientifiques croisent les thématiques du genre et du handicap avec celle de l’ouverture sociale, les collèges et lycées partenaires étant tous situés en quartier politique de la ville ou en zone rurale.

 

Des résistances systémiques, aller plus loin que la mixité femmes/hommes

Si le taux de femmes dans les admissions de 1ère année est en progression depuis 8 ans, le taux de femmes parmi les candidatures progresse aussi mais moins rapidement (32% de femmes dans les candidatures au groupe INSA). D’autres éléments conjoncturels comme la récente réforme du bac peuvent impacter très rapidement la progression de la mixité, ce qui a été le cas cette année (-5 points de pourcentage à l’entrée en 1ère année). En effet les lycéennes reproduiraient des schémas déjà démontrés de « choix positifs » en variant les spécialités quand les lycéens sont plus enclins à se spécialiser vers des matières qui seront décisives pour l’entrée en école d’ingénieur.es.

Derrière le taux global enthousiasmant se cachent aussi des répartitions dans les départements de spécialités encore très marquées par le genre avec de grand écarts par exemple entre la filière biosciences et le génie électrique. Une thèse[1] réalisée auprès de la population étudiante insalienne en début de cursus montre une moindre confiance des jeunes femmes en leurs compétences à niveau scolaire équivalent voire supérieur ainsi que la prégnance de certains stéréotypes dans la représentation des filières et des métiers, en particulier pour l’informatique.

Afin d’élargir la question de l’égalité au-delà de l’enjeu numéraire, il s’agit aussi d’assurer la réussite et l’épanouissement personnel et intellectuel des étudiantes. En termes de réussite scolaire, aucune différence n’est notée entre les résultats des hommes et des femmes. En revanche, si la mixité participe bien évidemment à l’évolution des mentalités, subsistent des formes de violences sexistes et sexuelles qui traduisent souvent une remise en question de la place des femmes dans les STIM. L’établissement s’est engagé fermement dans la lutte contre les VSS avec une politique de tolérance zéro et la mise en place d’une cellule d’écoute, d’accompagnement et d’information contre les discriminations, harcèlement et violences sexistes et sexuelles.

 

Repenser les actions et les ambitions de l’établissement

L’INSA Lyon met en place un schéma directeur égalité de genre afin de structurer les actions de manière plus systémique et instaurer une approche intégrée de l’égalité afin que tous et toutes s’emparent de ce sujet. Egalité professionnelle, mixité des filières, lutte contre les violences sexistes et sexuelles et LGBTphobies, vie étudiante et associative, intégration de la dimension genre dans la formation et la recherche : l’objectif est de faire le lien entre les diverses thématiques et actions, entre les entités et entre les personnels et les élèves-ingénieurs.

Parallèlement à la mise en place d’une réelle culture de l’égalité, l’établissement s’engage, avec le Groupe INSA, à repenser l’ensemble de son modèle social, pilier de son histoire. Evitant le piège d’une lecture en silo, les lunettes de genre aident au contraire à comprendre les inégalités liées à l’origine sociale, géographique ou scolaire et penser des actions en synergie. Face aux défis et enjeux actuels liés au handicap, au genre ou à l’ouverture sociale, la politique de responsabilité sociale de l’établissement se traduit par une approche globale et systémique pour une culture volontariste et commune.

[1] Erouart Marion (2020) : Analyses psychosociales des processus d’orientation genrés vers et pendant les études d’ingénieur·e·s.

 

Clémence Abry-Duran,
chargée de mission égalité de genre de l’Institut Gaston Berger de l’INSA Lyon

 

 

A propos de Clémence Abry-Durand

Diplômée de Sciences-Po Toulouse en 2014 en se spécialisant dans le parcours Politique, Discriminations et Genre, Clémence Abry-Durand est chargée de mission égalité de genre au sein de l’Institut Gaston Berger de l’INSA Lyon. Elle travaille à la mise en place du schéma directeur égalité de genre de l’école et de manière transversale sur les questions de mixité, VSS, et d’égalité professionnelle. Elle coordonne également le cours Genre en jeu dédié à des élèves-ingénieurs de 4ème et 5ème année afin de les former aux grandes thématiques des études de genre et les sensibiliser aux biais de genre dans l’ingénierie.

 

A propos de L’INSA Lyon

Fondée en 1957, l’INSA Lyon est la première école d’ingénieurs française post-bac.  L’établissement développe un modèle d’ingénieur humaniste, en résonance avec les enjeux socio-écologiques contemporains, ouvert sur le monde des arts, du sport ainsi que les sciences humaines et sociales. Chaque année, l’INSA Lyon accueille plus de 6 000 étudiants et 600 doctorants et diplôme plus de 1 000 ingénieurs et 150 docteurs.

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