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Restitution du rapport sur le doctorat en SHS de l’Alliance Athéna

Ce rapport est le fruit d’un groupe prospectif sur le doctorat initié à la demande…
Publié le 22 janvier 2020
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Ce rapport est le fruit d’un groupe prospectif sur le doctorat initié à la demande du Président de l’Alliance Athéna. Son objectif était d’analyser les politiques publiques nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche en faveur du doctorat en SHS et d’élaborer des orientations stratégiques.

Le rapport est le fruit d’une réflexion collective stimulée par des représentants du MESRI (stratégie des politiques RH), le réseau national des collèges doctoraux, l’association Bernard Gregory, l’ANRT-CIFRE, Campus France, l’APEC, le cabinet Adoc Talent. Ces réflexions ont été conduites entre 2017-2019. Des auditions extérieures ont eu lieu entre 2018 et 2019 auprès de personnalités et de jeunes chercheurs investis dans la reconnaissance du doctorat en sciences humaines et sociales notamment auprès de l’ANDES, de Doctrix, de l’AVRIST, de doctorants en sciences humaines et sociales en régions.

 

Le diplôme de doctorat : un paradoxe français ?

En France, le doctorat est le diplôme le plus élevé, mais en pratique, il n’est pas le plus reconnu par les employeurs, même dans la haute fonction publique, ceci en dépit de dispositions réglementaires et législatives répétées en faveur du doctorat, dont l’arrêté du 2 mars 2019 enregistrant le doctorat au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Pourtant dans bien des pays étrangers, il s’agit d’un diplôme d’élite particulièrement dans les pays engagés dans des économies pour lesquelles le transfert des connaissances est une priorité : Suisse, Suède, Etats-Unis, Chine, Inde, Israël, etc. Dans ces pays, le nombre d’étudiants inscrits en doctorat ne cesse de croître alors qu’il régresse en France. Le paradoxe est particulièrement aigu pour le doctorat en sciences humaines et sociales.

 

Des inscriptions en doctorat en baisse continue depuis 2006

Sur un nombre total d’étudiants en France de 2,680 millions, en constante augmentation, on répertorie environ 75 000 doctorants (toutes disciplines confondues). Mais depuis 2006, on assiste à une baisse du nombre d’inscriptions en doctorat (15 % en sciences exactes et sciences de l’ingénieur ; 29 % en sciences humaines et sociales). Dans les Grandes écoles, 0,2 % des diplômés en master de management poursuivent en thèse en 2017 ; 6,5 % des masters d’ingénieurs.

Parallèlement, on note une hausse continue du nombre de diplômés en master.

On note aussi une stabilité du nombre de doctorats délivrés soit 14 800 par an an dont 5000 en sciences humaines et sociales.

 

Des données préoccupantes pour les doctorats sciences humaines et sociales

  • Des financements et des bourses rares : 1/3 des doctorants en SHS commencent leurs thèses sans financement bien que les contrats CIFRE soient en augmentation et que le nombre de CIFRE en SHS (dans certaines disciplines comme le droit) progresse depuis 2015. En SHS, les thèses CIFRE représentent 28 % de la totalité.
  • Une implication des partenariats public privé encore ténue pour les SHS, ainsi le dispositif jeunes docteurs du CIR n’a pas bénéficié aux SHS.
  • Des financements provenant davantage des PME et des ETI que des grands groupes internationaux.
  • Une durée moyenne de la thèse de 4 ans contre 3,5 ans pour les disciplines hors SHS.
  • Un abandon du cursus doctoral de plus de 40 % faute de bonnes conditions de travail et de financements.
  • Près de la moitié des doctorants SHS sont des actifs aussi peut-on considérer le cursus doctoral comme une formation tout au long de la vie plutôt qu’en formation initiale et d’où aussi un allongement de la durée du cursus de 1,5 an.
  • Plus de la moitié des actifs (57 %) ont conservé leur emploi pendant la préparation de leur thèse ce qui signifie qu’une grande partie des doctorants en SHS ne peuvent se consacrer pleinement à leur recherche.

 

Au final, hormis le développement de stratégies alternatives des doctorants SHS des Grandes écoles au travers des DBA, Executive PhD, Executive doctorate en management, l’insertion professionnelle est peu satisfaisante.

 

Selon les données du SIES en juin 2019 :

  • 86% seulement des docteurs en SHS sont classés niveau cadre soit 7 points de moins que la moyenne des autres docteurs.
  • 7 docteurs SHS sur 10 ont un emploi stable 3 ans après leur diplôme, ce qui signifie que beaucoup sont sans emplois pérennes.
  • 8 sur 10 travaillent dans le secteur public. La recherche privée est un secteur marginal ainsi que le secteur privé en général ce qui réduit le périmètre d’insertion professionnelle.
  • Au sein des SHS, les insertions sont contrastées :
    en effet, les docteurs en sciences sociales, particulièrement en droit, en sciences politiques, en économie, en gestion ont un meilleur taux d’insertion que ceux en sciences humaines, sauf pour les docteurs en langues, littérature, histoire mais ces derniers n’obtiennent pas tous des emplois de cadres.

 

Ce constat n’est finalement pas à la hauteur de la qualité, des compétences acquises et de l’investissement des doctorants et des docteurs en SHS.  En effet, malgré des contraintes matérielles et structurelles, de nombreux obstacles, restent des modèles d’investissement personnel. Leurs compétences, tant intellectuelles (rigueur, synthèse, analyse) que professionnelles (travail d’équipe, capacité à créer un réseau), gagneraient fortement à être mises en avant.

 

Quelques recommandations :

  • Créer un observatoire du doctorat afin d’établir des comparaisons annuelles poussées en lien avec l’Europe et les pays engagés dans une politique active de promotion des études doctorales
  • Un renforcement de la professionnalisation des formations doctorales, adaptées aux publics des doctorats SHS
  • Une incitation au transfert des compétences des docteurs SHS dans les écosystèmes de l’innovation disruptive
  • Des mesures concrètes pour l’insertion des docteurs SHS dans LES mondes professionnels (réseau d’Alumni docteurs France sur le modèle du réseau Gain en Allemagne).

 

Pour en savoir plus :

 

Maria Bonnafous-Boucher,
représentante de la Conférence des grandes écoles à l’Alliance Athéna en charge du groupe de travail prospectif sur le doctorat en sciences humaines et sociales

 

 

 

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