Accueil 5 DDRS 5 Entretien avec Maud Fontenoy, navigatrice française née à Meaux le 7 septembre 1977 et pratiquant aussi bien la rame que la voile

Entretien avec Maud Fontenoy, navigatrice française née à Meaux le 7 septembre 1977 et pratiquant aussi bien la rame que la voile

Maud Fontenoy est tombée dans la marmite « océan » très jeune. Embarquée dès l’âge…
Publié le 22 novembre 2012
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Maud Fontenoy est tombée dans la marmite « océan » très jeune. Embarquée dès l’âge de 7 jours sur la goélette familiale, elle y passe toute son enfance en parcourant les mers du globe. Elle suit la formation de l’école de voile des Glénans et se forme par la suite à la discipline de la rame en référence à la performance de Gérard d’Aboville, qui est le premier à traverser l’Atlantique à la rame. En 2003 elle est la première femme à réaliser cet exploit. Après de nombreux autres exploits elle crée la Fondation Maud Fontenoy, reconnue d’utilité publique, qui s’engage pour la sauvegarde des océans et du littoral, notamment grâce à des actions pédagogiques auprès de la jeunesse.

CGE : la Fondation Maud Fontenoy promeut la défense des océans, ce qui est logique au regard de votre parcours. Votre ambition est elle de vous servir de la thématique « océan » comme une clé d’entrée pour embrasser l’ensemble des enjeux du développement durable ?

M.F. : Tout à fait, le credo de notre fondation c’est de dire que sauver les océans c’est aussi sauver les hommes. Les océans couvrent les ¾ du globe, ils participent grandement à la régulation du climat, au cycle de l’oxygène et permettent de nourrir une grande partie de la population mondiale. Les océans recèlent aussi les énergies de demain. La vague verte que nous vivons actuellement pourrait être allègrement teintée de bleue et la France a une responsabilité toute particulière car elle est la deuxième puissance maritime mondiale en termes de surface marine territoriale. L’enjeu environnemental lié aux océans est vital pour l’humanité et la France a un rôle majeur à jouer.

CGE : La question de l’exploitation des ressources halieutiques, notamment dans les eaux internationales, est-elle centrale pour votre fondation ?

M.F. : Le risque majeur pour les ressources halieutiques est, avant la surpêche, celui de l’acidification des océans. Ce phénomène résulte de l’absorption massive du Co2 issu des activités humaines par les océans. Cette acidification a pour résultat d’empêcher tous les organismes tels que les coraux, les mollusques de se développer, c’est donc la base de la chaîne alimentaire marine qui est en danger. La surpêche est aujourd’hui une problématique largement prise en compte, ce qui n’empêche pas la pêche illicite de perdurer, que ce soit dans les eaux territoriales ou en haute mer. Il y a un fort besoin de régulation en la matière. Je suis personnellement favorable à l’instauration d’une Organisation mondiale de l’environnement, à l’image de l’OMC pour le commerce, qui soit capable d’édicter des règles communes et qui ait un pouvoir de sanction le cas échéant. Je suis cependant lucide sur le temps que cela prendra pour qu’une telle organisation voie le jour. Les négociations internationales sont longues et fastidieuses et Rio+20 n’a pas réussi à accoucher d’une telle résolution. Fort heureusement mon travail au sein de la fondation me permet d’avoir des résultats beaucoup plus rapides, ce qui est très satisfaisant. Je pense notamment à l’attitude de la jeunesse qui évolue très vite grâce, entre autres, à nos actions de sensibilisation.

CGE : L’éducation des enfants est un axe central de votre action, vous adressez-vous aussi aux jeunes adultes ?

M.F. : On s’adresse à tout le monde. Nous avons cette année un programme que nous mettons en place dans les lycées, en partenariat avec le CNRS, sur la thématique des métiers liés à l’environnement et plus spécifiquement sur ceux en rapport avec l’énergie. Nous avons également des programmes grand public via nos campagnes d’affichage et nos campagnes de sensibilisation généralement en lien avec des ouvrages que j’ai pu rédiger.

CGE : Avez-vous des actions spécifiques concernant l’enseignement supérieur ?

M.F. : A ce jour non mais je pense qu’il est essentiel que ce creuset d’intelligences et de compétences soit associé et mobilisé, via la recherche notamment, sur les sujets de la transition énergétique et de l’innovation plus largement. Aujourd’hui il faut investir et nous comptons beaucoup sur les grandes écoles pour former les futurs ingénieurs qui inventeront le monde de demain.

CGE : Imaginez-vous la Fondation Maud Fontenoy parrainer une chaire, une activité de recherche au sein d’une grande école ou d’une université ?

M.F. : J’adorerais, ce serait fabuleux !

CGE : Une question un peu plus personnelle : de quel monde rêvez-vous pour votre petit garçon ? Etes vous optimiste ou pessimiste ?

M.F. : Alors je suis évidemment une éternelle optimiste, et si moi j’ai réussi à traverser deux océans à la rame avec mes petits bras c’est bien que tout est possible. Je crois beaucoup en l’Homme et en sa capacité de changer, d’inventer, d’avoir des rêves plus grands que lui et de les réaliser néanmoins. Je pense qu’il faut être audacieux et ambitieux. Je constate énormément de changements auprès de la jeunesse et nous devons continuer à diffuser les connaissances qui permettront à ces jeunes de devenir des décideurs responsables. C’est en comprenant mieux la nature que l’on apprend à l’aimer et c’est pour cela que j’ai basé une grande partie des missions de ma fondation sur l’éducation via des partenariats avec des instituts scientifiques. Je rêve d’une société qui se tourne vers les océans, en ne les considérant pas uniquement comme un lieu de loisir ou d’expression de la liberté mais comme un bien commun qu’il faut préserver.

CGE : Et si votre fils un jour vous dit « cela ne m’intéresse pas tout cela, j’ai juste envie de penser à moi et de bien gagner ma vie » ?

M.F. : En tant que parent je ne suis pas là pour décider de son avenir, il fera ses propres choix. Je fais de mon mieux par contre pour lui transmettre un certain nombre de valeurs en lesquelles je crois et pour lui faire découvrir les merveilles de la nature. J’imagine assez mal que son projet de vie se résume à gagner de l’argent, même s’il n’y a aucun mal à vouloir en gagner, même beaucoup. Ce qui compte, c’est pourquoi on le fait et ce que l’on en fait, adopter un mode de consommation durable par exemple.

Propos recueillis par Gérald Majou de La Débutrie
Chargé de mission développement durable de la CGE

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