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La place de la science dans la prise de décision politique

Une institution originale au sein de la République, l’Office parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et…
Publié le 22 janvier 2017
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Une institution originale au sein de la République, l’Office parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques

La question de la prise en compte des découvertes scientifiques et des avancées de la science dans les prises de décision politiques n’est pas nouvelle, elle se pose de manière régulière depuis le Siècle des Lumières qui a considéré que la science était la principale source potentielle du progrès de l’humanité toute entière.
Toutefois, dans un passé récent, cette question s’est à nouveau posée avec une acuité nouvelle. C’est ainsi qu’au début des années 1980, à l’occasion d’un certain nombre de débats tels ceux concernant les orientations des programmes nucléaires, spatiaux ou des télécommunications, le Parlement avait constaté qu’il n’était pas en mesure d’apprécier, en toute indépendance et de façon rationnelle, les décisions du gouvernement sur les grandes inflexions de la politique scientifique et technologique. C’est dans ce contexte particulier que l’Assemblée nationale et le Sénat ont donc conjointement décidé de se doter d’un outil propre d’expertise et d’évaluation, dédié aux questions liées à l’évolution des connaissances scientifiques et au développement des nouvelles technologies : l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) . L’OPECST constitue un intermédiaire entre le monde politique et le monde de la recherche. Il est assisté d’un conseil scientifique qui reflète dans sa composition la diversité des disciplines scientifiques et technologiques.

La méthode de travail de l’OPECST est désormais très éprouvée et beaucoup de parlements étrangers nous envient l’existence d’une telle instance et d’une telle procédure pour éclairer les parlementaires. Lorsqu’un sujet va être étudié par l’OPECST, un parlementaire membre est désigné comme rapporteur. Ce dernier effectue d’abord une étude de faisabilité. Cette étude a pour objet d’établir un état des connaissances sur le sujet, de déterminer d’éventuels axes de recherche, d’apprécier les possibilités d’obtenir des résultats pertinents dans les délais requis, et enfin de déterminer les moyens nécessaires pour engager un programme d’étude.

Le rapporteur soumet ensuite aux membres de l’OPECST les conclusions de son étude de faisabilité qui doit être accompagnée d’une réflexion méthodologique. Il propose alors, soit d’engager un programme d’étude conduisant à l’établissement d’un rapport, ce qui est de loin le cas le plus fréquent, soit de reformuler la saisine (ainsi, une saisine portant initialement sur les biocarburants a été élargie aux perspectives du développement des productions agricoles à usage non alimentaire) soit, exceptionnellement, de ne pas poursuivre les travaux.

Lorsque la décision d’engager l’étude est arrêtée, le rapporteur procède à des auditions privées qui lui permettent de recueillir l’avis de personnalités scientifiques ou de représentants d’entreprises, d’associations, d’administrations ou d’agences. Il peut également organiser des auditions publiques ouvertes à la presse et effectuer des missions en France ou à l’étranger. Pour l’assister dans ses travaux, le rapporteur peut constituer un groupe de travail, ou « comité de pilotage », composé de personnalités compétentes extérieures au Parlement. La particularité des rapports de l’OPECST c’est qu’ils ne se limitent pas à juxtaposer des points de vue d’experts. Les informations rassemblées sont analysées par les rapporteurs. À l’issue de leur étude, ils soumettent leurs conclusions et leurs recommandations aux membres de l’OPECST. Ces derniers se prononcent sur la publication de ces travaux. Il faut d’ailleurs noter à cet égard que les décisions de l’OPECST sont prises le plus souvent à l’unanimité, ce qui montre que sur des aspects ayant trait à la science et à la technologie, il est possible de trouver des points de convergence par-delà les clivages politiques traditionnels.

Il faut noter que depuis la création de l’OPECST, pas loin de 200 rapports ont été publiés, abordant des sujets extrêmement variés, comme en témoignent les études portant sur l’évolution du secteur de la micro/nanoélectronique, les risques et dangers pour la santé humaine de substances chimiques d’usage courant, les enjeux de la biologie de synthèse, les apports de la science et de la technologie à la compensation du handicap, l’amélioration de la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques, l’apport de la recherche à l’évaluation des ressources halieutiques et à la gestion des pêches, la stratégie nationale en matière d’énergie ou encore sur les matières critiques et stratégiques.

Au cours de la XIIIème législature, l’OPECST a été amené à s’intéresser d’une façon particulière à l’organisation de la recherche française, notamment en rendant, à la demande du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur, un avis concernant la stratégie nationale de recherche et d’innovation et en encourageant, via une audition publique, la création des alliances thématiques de recherche. À la suite du lancement du Grand Emprunt depuis devenu Programme des Investissements d’Avenir (P.I.A.), l’OPECST a œuvré au rapprochement des alliances nationales de recherche et du Commissariat général à l’investissement, et s’est attaché à dresser un premier bilan des investissements d’avenir. Désormais, façon aux montées de l’irrationnel, un nouveau besoin se fait sentir, celui de promouvoir la culture scientifique et défendre le respect des acquis de la science. C’est pourquoi, nous sommes un certain nombre de parlementaires à avoir créé, avec des scientifiques et des professionnels des médias, une association appelée « Démo-Science » qui a pour objectif de valoriser la place de la science dans le débat public.

Patrick Hetzel
Député du Bas-Rhin
Professeur des universités
Membre de la commission des Finances, de l’Economie générale et du contrôle budgétaire
Assemblée nationale

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