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L’accès aux études en Allemagne : entre ouverture et sélection

Le système d’enseignement supérieur allemand est, tout comme le système français, très majoritairement un système…
Publié le 22 février 2016
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Le système d’enseignement supérieur allemand est, tout comme le système français, très majoritairement un système public, ne chargeant pas de frais d’études proprement dits et accessible à tous ceux qui sont en possession d’une Hochschulzugangsberechtigung , c’est-à-dire d’un diplôme secondaire donnant accès aux études supérieures. En Allemagne, un peu plus de la moitié des élèves d’une classe d’âge (51 %) obtient le Abitur, le baccalauréat allemand.
Chaque année, ce pourcentage augmente d’un point. Néanmoins, il reste, pour l’instant, largement inférieur au taux des bacheliers français (77.2% en 2015).

La plupart des bacheliers décident de faire des études à l’université ou à la Fachhochschule. 56 % des bacheliers s’inscrivent directement après l’obtention du baccalauréat. Quatre ans et demi après le baccalauréat, une augmentation à 78 % de la même classe d’âge peut être constatée.

En Allemagne, il y a trois types d’établissements d’enseignement supérieur : Le statut d’université est conférée aux universités généralistes traditionnelles, mais également aux universités techniques et aux institutions spécialisées telles que les Ecoles supérieures ecclésiastiques catholiques et protestantes et les Ecoles supérieures de pédagogie. Les Fachhochschulen proposent des formations appliquées, notamment en sciences d’ingénieur et de gestion. Contrairement aux universités, les Fachhochschulen n’ont pas le droit de décerner des doctorats. Un troisième type d’établissement d’enseignement supérieur sont les écoles supérieures des beaux-arts et de musique.

Dans le semestre d’hiver 2015/2016, le nombre d’étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur allemand s’élevait à 2 759 000, dont 503.000 en première année. C’est ce que révèlent les chiffres publiés par l’Office fédéral de la statistique (Destatis). Par conséquent, le nombre d’étudiants inscrits a atteint un niveau record. En comparaison avec le semestre d’hiver 2014/2015, le nombre d’étudiants a augmenté de 2,2 %.

La hausse substantielle du nombre d’étudiants qui a pu être constatée ces dernières années est en partie due au fait que les lycées allemands sont passés d’une scolarité de 9 à 8 ans et aux doubles promotions de bacheliers arrivant dans les universités allemandes. Mais à part cette situation particulière, les chiffres augmentent de façon permanente depuis des décennies. Pour donner un exemple : En 2001, il n’y avait que 1,9 millions d’étudiants inscrits. Tandis que le nombre d’étudiants augmente constamment, celui des jeunes en formation professionnelle diminue. Le duales System d’apprentissage en entreprise qui est un des piliers de l’économie allemande vacille ce qui préoccupe beaucoup les experts du marché de l’emploi en Allemagne.

La condition principale pour être admis dans un établissement d’enseignement supérieur, c’est d’être titulaire du baccalauréat. Ceci vaut pour les universités et les Fachhochschulen..
Contrairement à la France, il n’existe donc pas de distinction fondamentale entre un secteur accessible à tous les bacheliers et un secteur sélectif.

Par contre, cet accès généralisé aux études est contrecarré par le « numerus clausus », mécanisme de sélection assez répandu en Allemagne. Un nombre considérable de cursus est confronté à une demande nettement supérieure aux places disponibles. L’accès aux places d’études est donc restreint, ce qui signifie que les étudiants sont soumis à une procédure de sélection. Celle-ci s’effectue principalement sur la base des notes obtenues au diplôme précédent, soit le baccalauréat ou la licence. Parmi les autres critères qui sont appliqués de façon variable, il y a d’abord le temps d’attente, ensuite des tests d’aptitude et des entretiens de candidature.

En matière d’accès restreint aux études, il faut distinguer entre les matières sans « numerus clausus » (inscription libre à l’université), les matières avec un numerus clausus interne à l’université et les matières avec un « numerus clausus » national en vigueur dans toute l’Allemagne. Dans les filières de médecine, médecine vétérinaire, dentisterie et pharmacie, qui sont très demandées et donc soumises à une sélection au niveau national, l’admission ne dépend pas exclusivement de l’université, mais s’effectue à travers un office central, la Stiftung für Hochschulzulassung.

Cette restriction de l’accès à certaines filières d’études est établie dans près de la moitié des universités et des Fachhochschulen en Allemagne. Dans les 20 universités les plus grandes en Allemagne, deux tiers des filières sont soumises au « numerus clausus ». Cependant, le nombre de filières à numerus clausus est actuellement en baisse. Selon une étude du Centrum für Hochschulentwicklung (CHE), on comptait, au semestre d’hiver 2015/16, 42 % des filières avec un « numerus clausus ». Par rapport au semestre d’hiver 2013/14, leur taux a diminué de 3,4 %.

Contrairement aux universités et Fachhochschulen qui ne sélectionnent pas ou très peu leurs futurs étudiants, il faut passer un examen d’aptitude pour accéder aux études de sport ainsi que dans les académies d’arts plastiques et les conservatoires de musique. Les deux universités prestigieuses de Munich, la LMU et la TUM ont récemment décidé de suivre cet exemple et d’introduire des concours pour certaines filières.

Après quelques années d’expérimentation avec des frais de scolarité, ceux-ci ont été supprimés successivement dans tous les Länder. Il n’y a donc plus de frais d’inscription, sauf dans certains établissements privés. Par contre, les étudiants doivent s’acquitter d’une cotisation semestrielle au moment de leur inscription ou de leur réinscription. Le montant varie selon les établissements entre 100 et 250 euros- Il comprend des contributions au service des étudiants (Studentenwerk) et à la représentation élue des étudiants (Allgemeiner Studierendenausschuss, AStA).
Dans de nombreuses villes, le paiement de la cotisation semestrielle donne droit au ticket semestriel qui permet aux étudiants d’utiliser gratuitement les transports publics.

En Allemagne, il n’existe pas de sélection spécifique pendant les études. Comme il n’y a pas le concept d’année universitaire telle qu’il existe en France, les étudiants reportent et répètent des examens sans qu’il y ait une forme de sanction. Dans certaines filières, les étudiants doivent passer un examen intermédiaire afin de pouvoir continuer leur cursus, par exemple en droit, médecine, pharmacie et en sciences de l’ingénieur. Pour les étudiants en médecine, c’est le Physikum qui s’effectue au terme du quatrième ou cinquième semestre.

L’absence quasi-totale de sélection formalisée pendant les études n’empêche pourtant pas qu’un pourcentage assez élevé d’étudiants abandonne ses études. Ceci vaut surtout pour les études de licence où le taux d’abandon s’élève à 28 %, selon une étude du Deutsches Zentrum für Hochschul- und Wissenschaftsforschung (DZHW) publiée en 2014. L’étude montre que ce taux varie selon les types d’établissements et les disciplines. Avec 34% d’abandons, les Fachhochschulen sont légèrement plus performants que les universités (39% d’abandon).
Parmi les disciplines, ce sont les mathématiques qui sont en tête, avec un taux d’abandon de 47 %, suivi des sciences de l’ingénieur avec 36 % d’abandons. Pour ce qui est des étudiants étrangers, le taux d’abandon est de 41 %, donc nettement supérieur à celui des étudiants allemands. Ceci permet de conclure que, malgré une sélection plutôt faible et l’absence de frais de scolarité en Allemagne, il reste du chemin à faire pour rendre encore plus accessible et plus performant le système d’enseignement supérieur allemand, notamment à l’échelle internationale.

Christiane Schmeken
Directrice du bureau parisien du DAAD

A propos de Christiane Schmeken

Christiane Schmeken
Directrice du bureau parisien du DAAD

En tant que directrice du bureau parisien du DAAD (Office Allemand d’Echanges Universitaires) à Paris, ma tâche principale est d’encourager et de soutenir les échanges franco-allemands en matière de coopération universitaire. Notre bureau gère une variété de programmes de bourses, entretient un réseau de 50 lecteurs enseignant l’allemand dans des universités françaises et propose des conférences et des rencontres autour de l’internationalisation de l’enseignement supérieur en France et en Allemagne.

Ethnologue de formation, j’ai rejoint le siège du DAAD à Bonn en 2000. Depuis, j’ai occupé plusieurs postes au sein du DAAD, entre autres dans le domaine du marketing international de l’enseignement supérieur, de la création de cursus à double diplôme et des stratégies institutionnelles d’internationalisation. J’ai ainsi pu acquérir une vision assez large des processus d’internationalisation de l’enseignement supérieur en Europe et dans le monde ainsi que des connaissances approfondies dans la gestion de programmes et le management de projets.

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