Accueil 5 Recherche & Transferts 5 Les écoles de management françaises investissent significativement le segment doctoral en synergie avec leur développement académique ! C’est heureux … mais compliqué !

Les écoles de management françaises investissent significativement le segment doctoral en synergie avec leur développement académique ! C’est heureux … mais compliqué !

Il y a quelques années encore, dans le milieu des écoles de management, la préoccupation…
Publié le 29 juillet 2016
Partager l'article avec votre réseau

Il y a quelques années encore, dans le milieu des écoles de management, la préoccupation doctorale était l’affaire de quelques institutions, pour ne pas dire d’une seule école, résolument quand il s’agit du doctorat estampillé par les pouvoirs publics. En effet, pendant longtemps, seule HEC Paris était habilitée à délivrer un doctorat reconnu par l’Etat. C’est dire que sur ce diplôme universitaire par excellence, on assiste à un maintien forcené du monopole de l’Université, même si celui-ci a eu tendance à se fissurer au profit des institutions les plus prestigieuses et à la faveur du mouvement de construction d’Ecoles doctorales dépassant les frontières entre les établissements et faisant jouer les liens formels ou informels entre chercheurs et entre laboratoires. Quand on sait en effet le développement volontariste de la recherche dans les écoles de management ainsi que le développement intensif de leurs corps professoraux, cette évolution n’est pas étonnante en soi, même si le doctorat reste un élément fort de tensions, d’incompréhension et de rivalités souvent exacerbées. Autant entre les équipes de chercheurs, le courant passe entre collègues qui se connaissent quel que doit leur ancrage organisationnel, se fréquentent dans les associations scientifiques qui transcendent les clivages, autant au niveau institutionnel, la crispation peut être à son comble, explicite ou pire encore larvée, laissant souvent place à des impasses assez incompréhensibles et où l’inertie peut rester élevée.

Le besoin de doctorat est naturel !
Aujourd’hui, la donne a donc changé et plus d’un tiers des écoles de management du Chapitre ont investi le segment doctoral sous une forme ou sous une autre. C’est dire que le besoin de doctorat est un prolongement naturel de l’élévation de la qualité des Ecoles en matière de recherche et d’augmentation du profil de leurs corps professoraux (souvent de plus en plus robustes en matière d’HDR malgré leur dimension internationale, ce qui est d’autant plus méritoire), représente un élément d’alignement du profil international des établissements et devient même un élément d’attractivité accrue pour le recrutement d’enseignants et la structuration d’équipes et d’agendas de recherche. Le doctorat, d’une certaine manière, apparaît à la fois comme un élément de déploiement de la stratégie scientifique et un de ses leviers. Comme aimait à le narrer notre collège Jean-Pierre Nioche, professeur émérite à HEC, mettant en exergue la genèse historique du doctorat de l’établissement, le directeur de l’enseignement de l’institution consulaire avait défendu fortement l’idée de la nécessité d’un programme doctoral en propre par la formule assez explicite : « un corps professoral est adulte à partir du moment où il est capable de se reproduire ! ».
Bien évidemment, ces programmes, dans l’ensemble très jeunes, représentent encore de faibles promotions mais aussi des flux de soutenances encore confidentiels, sauf pour les plus établis d’entre eux. Ils sont en moyenne plus internationaux que les programmes doctoraux universitaires traditionnels et avec une ambition explicite de placement académique fort contrairement au placement effectué par leurs consoeurs écoles d’ingénieurs, en dehors de quelques exceptions de programmes centrés vers le placement en entreprise.

Un développement aux formes variées
Le développement de l’offre doctorale prend des formes variées, un peu au gré de la place que les écoles trouvent dans leur environnement national et de leur ambition internationale. On observe dans l’ensemble que les écoles françaises tentent quand elles le peuvent le jeu de leurs Ecoles doctorales territoriales quand le jeu institutionnel peut être favorable à leur affiliation, plus ou moins sur un siège confortable mais elles s’en affranchissent aussi par nécessité ou par vision au profit de programmes doctoraux à plusieurs, avec des Universités hors territoire ou même hors hexagone.

On peut même observer des jeux originaux de contournement par des coopérations avec des ED au spectre disciplinaire élargi, par exemple dans le domaine de l’ingénierie. Ce développement peut prendre la forme de programmes Ph.D ou de programmes DBA, souvent lancés sur le marché hexagonal mais aussi dans le cadre de joint-ventures à l’étranger.
En bref, tout se passe de manière assez foisonnante encore, comme si les établissements étaient à la recherche d’une trajectoire sur un segment dont elles savent qu’elles ne pourront faire l’économie comme elles n’ont pu faire l’économie d’une recherche forte mais qui s’avère institutionnellement complexe tant vis-à-vis du monde universitaire que du monde professionnel. Il est vrai qu’en dehors du DBA qui s’apparente au positionnement de l’Executive MBA, le doctorat n’est pas fait pour simplifier leur équation financière déjà fortement complexe en ces temps difficiles et où le coût de leur recherche leur est déjà renvoyé comme un boulet. Gageons qu’elles sauront trouver une fois encore avec agilité le nombre d’or pour faire rimer ancrage national, visibilité internationale et synergies organisationnelles.

Tamym Abdessemed
Directeur Académique et de la Recherche
ICN Business School

A propos de Tamym Abdessemed

Tamym ABDESSEMED est Directeur Académique et de la Recherche d’ICN Business School où il est également professeur de management stratégique et membre du CEREFIGE. Il est par ailleurs président du groupe de travail recherche du Chapitre des Ecoles de management de la Conférence des Grandes Ecoles. Il dirige également le Ph.D Universa d’Ecricome et est depuis décembre 2013, membre du comité de pilotage du Baromètre « Recherche » de la FNEGE.
Diplômé d’HEC dont il est sorti lauréat de la Liste du Président (major de promotion), titulaire d’un DEA de management et stratégie de l’Université de Paris-X Nanterre et d’un certificat de spécialisation du doctorat HEC, Tamym ABDESSEMED est Docteur HEC ès Sciences de Gestion (spécialité stratégie d’entreprise) et est titulaire d’une Habilitation à Diriger des Recherches de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Auparavant, il a notamment été Directeur des études d’HEC Paris, Directeur du Doctorat HEC, et Directeur Général de l’ESCEM.
Tamym ABDESSEMED est par ailleurs le responsable de l’axe de développement pédagogique ICN et est le directeur de la collection de cas ICN à la CCMP.

Partager l'article avec votre réseau
Loading...