8 étudiants des écoles de la Fédération Gay-Lussac ont accepté de témoigner sur cette période inédite, sur la manière dont ils ont réussi à poursuivre leur scolarité, passer leurs examens, rester en contact avec leur école. Ils partagent leurs difficultés mais aussi les enseignements qu’ils en retirent et leurs attentes pour la rentrée qui reste encore incertaine.
Continuité pédagogique, enseignement à distance
La continuité pédagogique a demandé à chaque élève un temps d’adaptation mais a été globalement bien vécue. « Dès l’annonce de la fermeture des établissements d’enseignements supérieurs, mon école a pris des mesures pour que nous ayons une continuité pédagogique. Chaque élève a ainsi pu suivre les cours sur une plateforme dédiée. » Gaëlle.
Les écoles se sont en effet mobilisées pour donner à tous la possibilité de poursuivre aussi sereinement que possible leur scolarité. « La continuité pédagogique a immédiatement été mise en place à l’ECPM et a été facilitée grâce à l’outil de travail choisi par l’école: les Ipads » Paul.
Les écoles ont privilégié des solution mixtes : « Certains cours se sont déroulés en séance de visioconférence en groupe réduits, dans des conditions très similaires à une séance de TD classique, pour d’autres les cours nous ont été envoyés sous forme numérique avec la liberté de les travailler à notre propre rythme » Axelle.
Les équipes enseignantes étaient en majorité très disponibles pour les élèves : « nous pouvions communiquer avec tout nos enseignants pour poser des questions », « l’ENSCMu a mis en place une rubrique « gardons le contact » ce qui m’a paru être une bonne initiative pour garder un lien avec l’école. » Magali.
Malgré quelques déceptions : « il y a eu plusieurs matières où nous avions presque aucune nouvelle ou alors aucune réponse à nos mails et questions » Emilie, la grande majorité des enseignants sont restés mobilisés pour accompagner et soutenir ceux qui en avaient besoin. « La charge de travail est au moins double. Il est très dur en effet de comprendre aussi bien les cours qu’en présentiel mais les professeurs compensent par leur présence. Tous mes professeurs répondaient aux mails, de 8h à 21h, et même les dimanches. » Samuel.
Certains élèves soulignent aussi l’intérêt de l’enseignement à distance : « Je pense sincèrement que le travail que j’ai réalisé à distance était de meilleure qualité : j’étais acteur de ma formation et je m’attardais plus sur les détails en réécoutant parfois plusieurs fois les cours, ce qui n’est pas possible lors d’un cours en présentiel. » Paul.
« Le confinement m’a permis de me concentrer beaucoup plus sur mes études et j’ai trouvé un bon rythme de travail la plupart du temps. » Emilie.
Ce qui était plus difficile d’un point de vue scolaire mais aussi personnel
Les élèves ont, pour la plupart, ressenti des difficultés d’organisation, de motivation et de suivi régulier des enseignements. « Le confinement a été long et difficile pour tout le monde, nous devions faire attention à ne pas perdre le fil pour ne pas accumuler trop de retard dans les révisions », Magali. « L’aspect le plus difficile à mon avis a été la conservation d’un rythme de travail régulier. Dans certains enseignements, j’ai perdu le fil rapidement, je n’avais plus de repères quant à l’avancement du cours, les notions que j’aurais du maîtriser à tel ou tel moment de l’année. » Axelle. « D’un point de vue personnel il s’agissait notamment d’un manque de motivation. » Emilie.
La recherche de stage a également été vécue comme anxiogène : « Beaucoup d’entreprises étaient en télétravail et beaucoup ont donné des réponses très tardivement. Mais heureusement tout s’est bien terminé (année et stage en poche ) », Magali. « Ce qui m’a semblé le plus difficile c’est d’être dans le flou quant à la possibilité d’effectuer mon stage à l’étranger. Je m’apprêtais à partir en stage au Royaume-Uni, au sein d’un laboratoire de Recherche et Développement dans une grande entreprise de cosmétique. Personne ne savait comment allait évoluer la situation et j’ai tardé à avoir une réponse définitive. Mon stage a finalement été annulé. », Blandine.
Gaëlle, en 2e année CPI à Sigma Clermont souligne aussi l’annulation des Journées Portes Ouvertes de l’école qu’elle visait. « Je n’ai donc pas pu découvrir les locaux et la ville avant de valider mes vœux. »
Enfin, les élèves ont tous ressentis la difficulté d’être loin de leurs amis, de leur promotion et de l’école. « Durant toute notre scolarité, nous avons été habitués à partager cours et compositions avec nos camarades. Le fait de les avoir vécus seul et à distance était plus angoissant, il n’y avait plus la dynamique de groupe et les moments d’échange en fin de cours, tant appréciés. » Paul.
Ce qui a été positif : nouveaux modes d’apprentissage, adaptabilité, persévérance
Cette période singulière a obligé les professeurs et les élèves à s’adapter rapidement. Les enseignants ont du massivement utiliser les outils informatiques pour les visios, les échanges avec leurs élèves et les examens. Certains en ont profité pour créer une version numérique de leurs cours papier. Cette « prise en main de tous les outils informatiques aura permis de dynamiser l’enseignement. » Samuel.
Côté élève, leur adaptabilité a été de nombreuses fois mise à l’épreuve ! « Les professeurs nous ont demandé de faire preuve d’initiatives (comme réaliser une vidéo de présentation en communication, ou encore adapter les TP de mécanique des fluides à la maison). » « Chaque enseignant avait sa propre pédagogie pendant le confinement et de nouvelles pratiques ont donc été utilisées. Nous n’avions pas la possibilité de demander des conseils aux promotions antérieures. » Paul.
Les élèves ont dû également s’adapter aux modes d’évaluation, les traditionnels partiels écrits ayant souvent été remplacés par des projets. « Pour ma part, je trouve ce mode d’évaluation beaucoup plus intéressant car il permet aux élèves d’en apprendre plus sur certaines thématiques qu’ils pourront rencontrer en stage par exemple. » Elsa. « Les examens n’ont pas pu se faire dans les conditions habituelles et des alternatives nous ont été proposées : par exemple, à la place de passer un partiel écrit classique, nous avons étudié et présenté une publication scientifique en rapport avec nos enseignements. » Blandine. « Les méthodes d’évaluation ont évolué et étaient différentes de nos habitudes, souvent plus stressantes. Il a été nécessaire de s’adapter assez rapidement mais je retiens surtout les compétences en gestion de notre stress développées grâce à ce nouveau type d’évaluation. » Paul.
Cette situation a aussi permis aux élèves de prendre réellement en main leurs études en choisissant leurs propres méthodes de travail avec plus de souplesses dans leurs horaires. « On a pu aussi découvrir une nouvelle méthode de communication avec certain professeur : les forums, qui je trouve sont très pratiques car on a accès en peu de temps à l’ensemble des questions posés et leurs réponses. » Magali
Paul conclut : « Le confinement nous a aidé à acquérir une meilleure persévérance. Suivre nos études et travailler est ainsi devenu un réel choix qui, à certain moment, a pu être compliqué à réaliser car il s’opposait à notre vie de famille. Il a donc fallu être persévérant pour poursuivre nos études. Vous l’aurez compris, le confinement fut pour moi, une expérience très formatrice. »
La rentrée : attentes et craintes
Tous les élèves ont hâte de retrouver les bancs de l’école, leurs camarades et enseignants.
« Selon moi, la rentrée va être un des moments clefs : elle permet de s’intégrer dans une promotion et dans une école, c’est l’occasion de faire connaissance. La gérer en distanciel serait extrêmement compliqué, se découvrir à travers une webcam c’est mission impossible. Le retour en présentiel est donc primordial au niveau relationnel surtout. » estime Gaëlle, en 2e année de CPI qui s’apprête à intégrer le cycle ingénieur.
« Je vois la rentrée comme un défi. Les cours en distanciel nous ont retiré la capacité à nous entraider ce qui est vraiment clef dans la formation. » Samuel.
« J’ai hâte de retourner à l’école surtout pour retrouver mes amis car nous nous sommes quittés dans la précipitation, sans savoir combien de temps cela allait durer. » Axelle. « Cette situation m’a permis de comprendre que les échanges et interactions avec mes camarades et mes professeurs sont essentiels pour mon apprentissage » Paul.
Les élèves espèrent finalement retrouver une vie « normale » d’élèves en Grande Ecole : « Faisant partie du BDE, j’ai pour objectif d’organiser l’intégration et il est vrai qu’il est très difficile de se projeter. J’ai peur que la plupart des événements majeurs soient annulés ou déplacés et j’espère quand même pouvoir organiser une période plaisante pour les nouveaux arrivants. Nous en savons encore très peu donc nous essayons de rester optimistes. » Emilie
Mais tous attendent également de leur école qu’elle tire les enseignements de cette situation. « J’attends des échanges avec le corps enseignant et l’administration sur les ressentis de chacun vis à vis du confinement. Ma seule crainte serait que les difficultés rencontrées soient traitées comme anecdotiques, et qu’elles ne soient pas prises en compte à leur juste valeur, à ce qu’elles révèlent de peu efficace dans les méthodes d’enseignements/d’apprentissages… » Axelle. « J’espère que cette période de confinement permettra de tirer des conclusions et de montrer le potentiel des outils informatique pour la pédagogie en proposant par exemple, des vidéos ou PPT commentés en supplément des futurs cours magistraux pour que les élèves puissent les regarder à volonté. » Paul.
Avec la participation de :
En CPI 2eme année : Gaëlle VACHERAND à SIGMA Clermont
En cycle ingénieur 1ère année : Samuel ASTIER à SIGMA Clermont, Emilie DEBARNOT, Magali PUCET, Axelle STAUDT à l’ENSCMu, Paul PROENCA à l’ECPM
En 2ème année de cycle ingénieur : Blandine BRIAS à l’ENSCMu, Elsa SCHMITTBIEL à l’ENSCL
Témoignage de Mariana PARENTE MAGALHÃES LOURENCO LOBÃO, élève brésilienne en CPI deuxième année à SIGMA Clermont
Au début de la pandémie j’étais encore dans mon appartement à Clermont-Ferrand, donc suivre les cours n’était pas plus difficile que pour les autres élèves. Mais vers mi-avril je suis rentrée au Brésil, chez mes parents, et suivre les cours est devenu un peu plus compliqué à cause du décalage horaire de 5 heures, ce qui m’obligeait à me réveiller très tôt. Le plus déstabilisant pour moi était les cours où les enseignants attendaient une grande indépendance de notre part, parce que, sur certaines matières, j’avais beaucoup de mal à me concentrer et à bien comprendre juste en lisant les cours. Il m’est arrivé aussi d’avoir des difficultés à formuler mes questions.
Je pense, malgré tout, que ce confinement nous a permis d’être plus connectés que jamais, en nous encourageant à explorer des nouvelles façons de se communiquer et de travailler. Pour les enseignants je crois que cette situation leur a permis de trouver des nouvelles méthodes d’enseignement et d’évaluation. Pour nous, les élèves c’est une opportunité d’apprendre à mieux gérer notre temps et à être plus indépendants dans nos études, ainsi qu’à savoir faire face aux défis que représentent les cours à distance .
Pour la rentrée, j’imagine qu’il y aura un mixe de cours en présentiel en petits groupes et de cours magistraux à distance. Ma crainte c’est de ne pas bien m’intégrer en cycle ingénieur si jamais on doit être reconfinés ou si je me trouve dans une nouvelle ville où je ne connais personne et que l’on n’a que des cours en distanciel.