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Sofiane : l’ascension d’un ouvrier de chez Peugeot aux bancs de l’Essec

Sofiane interviendra au colloque organisé par la CGE le 12 mai 2016 à l’ISC Paris.…
Publié le 27 avril 2016
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Sofiane interviendra au colloque organisé par la CGE le 12 mai 2016 à l’ISC Paris. Il fait partie des intervenants de la Table ronde  » égalité des chances et ouverture sociale ».

Ayant arrêté ses études après son bac, Sofiane ne connaissait même pas l’existence de l’ESSEC alors qu’il était ouvrier sur une chaîne de montage, chez Peugeot. Pourtant, trois ans après, c’est bien dans la prestigieuse école de Cergy que ce jeune homme de 22 ans suit des cours, sans trop savoir – ce qui lui plaît – où tout cela le mènera : l’important est d’ouvrir toutes les portes, le reste suivra. Un impératif unique guidera ses choix de carrière : être utile et pouvoir rendre à tous ceux qui l’ont aidé à devenir qui il est, un aspirant leader qui ne renie rien de son histoire.


Sofiane Mabouth

« Etre l’aîné d’une fratrie de cinq vous donne beaucoup de responsabilités. Qu’un seul tienne et les autres suivront. Vous faites des études brillantes et vos quatre cadets vous suivent ; vous vous résignez et vous déclassez et vous insufflez à vos petits frères l’idée que l’ascenseur social n’est pas pour eux. Sofiane sait tout cela, pourtant, après une scolarité qui le mène sans encombre jusqu’au bac STG, il arrête.
Je ne savais pas quoi faire, les études ne me motivaient pas et je voulais gagner de l’argent. Mon père venait d’avoir une promotion chez PSA à l’usine de Poissy. Il était responsable de chaîne et a pu me faire embaucher au contrôle des sièges. Un emploi qui a été pris par un robot depuis. J’ai discuté avec les ouvriers, la plupart étaient les pères de mes copains du quartier. Ils m’ont expliqué qu’ils travaillaient dur pour que leurs enfants aient le choix » .

Sofiane vacille, il part l’été avec sa MJC, direction le Mali pour six mois et aider à construire une école. Révélation :
« l’enthousiasme pour l’éducation, c’était fou ! L’école n’était même pas construite et tout le monde en rêvait, j’ai compris que je me privais d’une chance inouïe ».

Problème, de retour en France il faut remplir ces kafkaïennes APB… Il coche tous les DUT pour boucler ses études en deux ans et un étrange acronyme, CPGE, en dernier recours. Bizarrement, c’est là qu’il est reçu. En réalité, la prépa manquait d’élèves et, avouons-le, les ambitions de l’établissement sont très modérées. Alors qu’il passe le plus clair de son temps à rattraper son retard et essayer de reprendre des bonnes habitudes scolaires, un email annonçant une réunion d’information de Passeport Avenir titille sa curiosité et l’ennuie, car il faut écrire une lettre de motivation. Chronophage aberration… à laquelle il se soumet. Il rencontre Mathieu Derand, d’Accenture, qui devient son parrain (il l’est toujours) et son rapport à la réussite bascule.

« Mathieu était exalté, il croyait en moi comme personne. Les limites et autres autocensures, il n’en avait cure. Il m’a emmené au siège d’Accenture à de multiples reprises, d’abord pour me faire aimer l’entreprise, puis pour me faire répéter les oraux ».

Sofiane se prend au jeu et le résultat dépasse ses espérances… Après les écrits, il est admissible aux écoles parisiennes, pour lesquelles il n’avait même pas préparé les oraux, aucun élève de son lycée n’y étant admissible. Mobilisation générale chez les profs pour le préparer à fond et le résultat est là, incroyable : l’ESSEC. Passer en si peu de temps de l’établi de Peugeot aux bancs de Cergy, voilà bien un résultat qu’aucun algorithme sociologique n’aurait pu prévoir. Il appelle son parrain, évidemment, lequel n’a qu’un défaut à ses yeux : être supporter de l’OM. Impardonnable pour ce fan du PSG « non mais sérieux, il vient d’Aulnay en plus, c’est un traître ! Mais bon, avec tout ce qu’il a fait pour moi, je lui passe… »

Préjugés, préjugés et demi
Arrivé à l’ESSEC, Sofiane est seul de sa prépa quand les anciens d’Henri IV ou de Louis le Grand se retrouvent à vingt ou trente. Le choc culturel est rude et pousse le jeune homme à une méfiance généralisée à l’égard des fils de bourgeois… Une attitude qu’il regrette bien vite, conscient qu’on ne peut plaider pour la lutte contre les préjugés à son propos et l’appliquer aux autres : il donne une seconde chance à la jeunesse dorée.

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