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Former des ingénieurs et managers stratèges par Alain Storck

Former les étudiants de nos écoles par la pensée critique en considérant que la formation…
Publié le 22 décembre 2014
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Former les étudiants de nos écoles par la pensée critique en considérant que la formation en sciences humaines et sociales n’est pas « réductible » aux visions utilitaristes de ces sciences et à l’enseignement des langues, du management, de la communication, de la connaissance de l’entreprise… est un impératif éducatif face aux crises actuelles de notre monde où se jouent tout autant des mutations des systèmes sociotechniques que de profondes transformations des façons de les penser. Au delà de l’engagement de nos écoles dans la formation d’ingénieurs et de managers responsables socialement, aptes au développement durable… (peu importe la terminologie), la période incertaine et complexe que nous connaissons nous invite aussi à réfléchir à la manière de former des ingénieurs et managers penseurs et stratèges et à promouvoir la stratégie dans la décision, mais aussi dans l’interprétation du monde et de notre environnement. De ce point de vue, le rôle des Sciences humaines et sociales, de la philosophie, de l’histoire, de la sémiotique, des sciences politiques… est essentiel.

La formation en sciences humaines et sociales ne peut simplement viser « L’adaptation des profils des ingénieurs et managers » à un environnement socio-économique prédéfini.
Elle doit bien plutôt offrir des outils conceptuels et des méthodes qui puissent les aider, comme technologues, managers et comme citoyens, à participer à la construction d’un environnement socio-économique en devenir.
Leurs métiers et modes d’intervention subissent des évolutions rapides, variées, essentiellement imprévisibles. Ils sont de plus en plus amenés à concevoir des situations d’activités plus que des dispositifs techniques. Ces situations intègrent des solutions techniques mais aussi des prescriptions organisationnelles et sociétales, des schémas d’usage, voire une idéologie particulière de la technique (allocation des rôles entre l’homme et la machine par exemple). Ces situations ont la particularité de s’étendre dans le temps et dans l’espace (physique et social) et nécessite des solutions « intégrées ». Les compétences transmises en SHS à nos étudiants doivent être pensées comme une introduction à une démarche réflexive qui les prépare à imaginer et concevoir des situations à venir inconnues, plutôt que comme un ensemble de connaissances théoriques et pratiques supposément calquées sur les besoins à court-terme des emplois sur lesquels débouche actuellement leur formation. Savoir penser la complexité des systèmes socio-techniques, nécessite des capacités d’autocritique et de décentrement que doit apporter une culture générale sur la construction historique des idées et des outils, culture que l’on peut alors confronter à l’actualité des stages et diverses expériences professionnelles rencontrées par les étudiants.

Des outils et méthodes pour aider à penser l’innovation émergente
Il ne s’agit pas seulement de donner des connaissances sur la culture d’entreprise et son contexte économique et social, ou bien encore de développer des capacités à communiquer dans un contexte politique et culturel international. L’innovation technique ne peut plus se détacher du sens que leur donneront les utilisateurs, sens qui dépend lui-même d’une dynamique socio-économique sans cesse modifiée par les innovations. Il faut donc fournir aux futurs ingénieurs et managers sortant de nos écoles les outils intellectuels pour penser le pouvoir transformant des innovations techniques dans la société contemporaine, anticiper ses évolutions et mesurer le sens de leur responsabilité dans le mouvement de l’évolution technologique. C’est là encore, les introduire à une démarche de réflexivité dont on ne peut prétendre connaitre d’avance les résultats.

Il est essentiel de leur fournir des savoirs et des méthodes qui participent directement et essentiellement aux processus de conception eux-mêmes en aidant à comprendre le sens des techniques, pour critiquer, agir, imaginer, créer, dialoguer et intervenir socialement.
De ce point de vue il faut affirmer aujourd’hui qu’il n’y a pas d’acceptabilité sociale du changement technique, mais toujours une co-construction, co-conception, plus ou moins heureuse, réussie ou non, dans un réseau d’acteurs qui échangent sans cesse leurs rôles de décideurs, concepteurs, utilisateurs ou producteurs.

A l’Université de Technologie de Compiègne, le cursus de tronc commun HuTech (Humanités et Technologie), porté par notre département « Technologie et Sciences de l’Homme », a été mis en place récemment et s’adresse notamment aux lycéens de la filière littéraire ; il vise, au sein du cycle préparatoire à nos filières d’ingénieur, à réconcilier science, ingénierie, technologie, philosophie et sciences humaines et sociales.


Le présent numéro de Grand Angle est le témoin de l’engagement de nos écoles dans cette réflexion.

Alain Strock
Président de l’Université de technologie de Compiègne

 

L’UTC, établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, a été créée en 1972 pour être une université expérimentale de technologie. Combinant dans ses statuts les atouts d’une université avec ceux d’une école d’ingénieurs, l’UTC, véritable écosystème local d’innovation, interagit aujourd’hui avec la société et le monde économique en anticipant les besoins en recherche des entreprises et en facilitant l’insertion professionnelle de ses 5000 étudiants. Construite sur une pédagogie de l’autonomie et une recherche technologique transdisciplinaire orientée vers l’innovation, l’UTC forme des ingénieurs, masters et docteurs aptes à appréhender les interactions de la technologie avec l’homme et la société, et à évoluer dans un environnement concurrentiel mondial, dans un souci de développement durable. Les enseignants-chercheurs et ingénieurs de l’UTC donnent un sens à l’innovation, en permettant l’émergence de nouveaux axes d’innovation et en introduisant l’entreprenariat et l’apprentissage au cœur de leurs préoccupations, associant sa marque à celle de la COMUE Sorbonne Universités dont elle est devenue membre fondateur autour de projets communs, tout en s’ancrant sur son territoire , la Picardie.
L’ouverture internationale est enfin une priorité pour l’UTC, qui a tissé depuis sa création des liens avec des partenaires universitaires et entreprises du monde entier et développé un campus à Shanghai en Chine et à Viña del Mar au Chili.

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