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Retour sur la dernière réunion annuelle de la Commission Formation et Carrières de la CGE

Publié le 20 juillet 2023
Retour sur la dernière réunion annuelle de la Commission Formation et Carrières de la CGE
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Le 06 juillet 2023 s'est tenue la Commission Formation et Carrières dans les locaux de l'ESCE au cœur de la Défense. Cette journée a été l'occasion d'échanger sur la formation et les compétences qui constituent le cœur de métier des Grandes écoles et de récompenser les pédagogies les plus innovantes au cours de la remise du prix Jean-François Fiorina pour l'innovation pédagogique. 

Commission Formation et Carrières organisée par la CGE dans les locaux de l'ESCE

Lors d'un évènement organisé le mardi 9 mai 2023 à la Cité des métiers de Bruxelles, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a lancé officiellement l'Année européenne des compétences en rappelant que "l'éducation est plus qu''une préparation à la vie, c'est une façon de vivre...Que vous commenciez votre carrière, en soyez au milieu ou près de la fin, investir dans la formation est la chose intelligente à faire". Car "le monde est en pleine transformation technologique et écologique", ce qui crée " des nouveaux emplois, de nouvelles façons de travailler, dont nous n'avions pas connaissance encore hier". Dans un monde en perpétuel mouvement, ces nouvelles modalités de formations représentent une opportunité pour des millions d'Européens de continuer à acquérir des compétences précieuses pour se préparer au mieux aux changements continus du marché du travail et répondre efficacement aux besoins des entreprises.

La dernière réunion annuelle de la Commission Formation et Carrières de la Conférence des grandes écoles organisée à la Défense le 6 juillet dernier fut ainsi l'occasion de questionner et de débattre des défis d'avenir en matière de formations et de leur adéquation avec les besoins des entreprises. Nicolas Glady, directeur de Télécom Paris, VP Formation et Carrières de la CGE a ouvert cet évènement en rappelant que les étudiants choisissent les établissements de la Conférence des grandes écoles car ils représentent une promesse pour leur carrière, une forme de garantie de succès comme le montre l'Enquête Insertion 2023 de la CGE. Les Grandes écoles sont des rampes de lancement pour la carrière des étudiants. Le cœur de métier des Grandes écoles réside dans leur faculté à faire le lien entre une assurance de carrière d'excellence et la formation. Il est important de noter également la prise en compte progressive, par les établissements, de la formation tout au long de la vie venant soutenir et renforcer le socle de la formation initiale.

  Mais comment établir un lien solide entre formation initiale et formation continue ? Enfin, si l'une des missions des Grandes écoles est de former leurs élèves tout en répondant aux besoins des entreprises, la question se pose de savoir comment répondre efficacement à leurs attentes et à leurs besoins immédiats.

 

Discours de Laurent Champaney, Président de la CGE, à l'occasion de la remise des prix Jean-François Fiorina pour l'innovation pédagogique

L'Année européenne des compétences

L'allocution de Marianne de Brunhoff, coordinatrice adjointe France de l'Année européenne des compétences permit par ailleurs de rappeler les défis européens à venir en matière de formation et d'acquisition de compétences nouvelles. Ainsi, l'évènement a pour ambition de donner un nouvel élan à l'accès à la formation et au développement des compétences pour tous tout au long de la vie, pour ainsi permettre à chacun de maîtriser son parcours et à l'Europe de se doter en compétences d'avenir. Il s'inscrit dans le contexte des transitions écologique et numérique ainsi que des tensions de recrutement et pénurie de compétences. Ces transitions ont des conséquences majeures sur le marché du travail, les travailleurs et leurs compétences, car elles provoquent simultanément la destruction, la transformation et la création d'emplois. Il en résulte que 77% des entreprises éprouvent des difficultés à trouver des candidats dotés des compétences souhaitées.

Pour répondre à ce défi majeur de transition du marché du travail, 4 objectifs communs ont été fixés. Tout d'abord, la promotion d'investissements accrus permettra de rendre plus efficaces et inclusifs la formation et le renforcement des compétences. En outre la veille en collaboration avec les partenaires sociaux et les entreprises permettra de contrôler l'adaptabilité des compétences aux besoins du marché du travail. Par ailleurs, mettre en adéquation les aspirations et les compétences des citoyens avec les possibilités offertes sur le marché du travail aidera à les préparer au mieux aux transitions écologique et numérique. Enfin, attirer des personnes de pays tiers possédant des compétences précises donnera l'occasion à l'Union européenne de répondre à ses besoins. C'est dans cette optique que la France inscrit pleinement ses priorités pour développer l'approche par compétences et la rendre la plus compatible possible avec les défis actuels.

Objectifs & Enjeux de l'Année européenne des compétences

La notion de compétence au cœur des programmes de formation

Que signifie réellement le terme de compétences ? S'agit-il de compétences théoriques ou de compétences propres à l'être humain ? Voici la question qu'invitait à se poser François Taddéi, fondateur et président du Learning Planet Institute. Il devient nécessaire aujourd'hui de développer les compétences humaines plutôt que celles des machines. Dans la mesure où son métier peut être remplacé par des intelligences artificielles, il faut rapidement se poser des questions entre savoir-faire éthique et connaissances : la formation des étudiants doit s'adapter à un monde en perpétuel mouvement. La vocation des Grandes écoles est de former des jeunes qui répondent aux besoins des entreprises, mais il est également important d'en faire des "planétoyens" prenant en compte les besoins de la Cité planétaire et plus uniquement locale.

À première vue on pourrait penser que l'approche par compétences constitue un risque de réduire la créativité des étudiants se retrouvant prisonniers d'un cadre trop formel. Or il est tout à fait possible de développer sa réflexivité individuelle et collective notamment par le biais des activités extra scolaires. Il faut inviter et encourager les jeunes à documenter les compétences qu'ils obtiennent au cours de ces activités.

Aujourd'hui le marché du travail est en quête d'individus capables de prouver en pratique les compétences qu'ils ont acquises. En ce sens, le diplôme n'est qu'un indicateur. Dans le monde actuel, l'esprit critique et la créativité sont essentiels pour se confronter aux défis d'avenir.  Les méthodes issues du monde de la recherche sont à cette aune très inspirantes pour affronter ce futur inconnu. Acquérir ces méthodes, développer des compétences telles qu'apprendre à apprendre, à se faire confiance, à faire confiance aux autres ou encore à s'informer, est primordial. Dans cette perspective, le cadre informel des expérience extra scolaires représente un bon moyen de développer ces compétences de créativité et d'esprit critique.

D'autre part, les compétences en termes de leadership voir de méta-leadership, qui correspondent à la capacité à diriger d'autres leaders en les incitants à partager une passion et un objectif commun, font nécessairement l'objet d'une acquisition progressive au cours de la vie et dans différents environnements. En effet, des capacités telles qu'être leader de soi-même, ou apporter aux autres des dynamiques inspirantes, sont difficiles à développer très jeunes. Pour que cette capacité de méta-leadership émerge auprès des jeunes, il faut les aider à penser out of the box en définissant un cadre d'exploration tout en laissant le champ libre au cadre de compétences. Cette liberté de cadre rendue possible par l'approche par compétences permettra aux jeunes diplômés de façonner ensemble des choses exceptionnelles.

La formation tout au long de la vie est-elle plus importante que la formation initiale ?

La réforme de la Validation des Acquis de l'Expérience

Depuis le 17 janvier 2002 la Validation des acquis de l'expérience est un dispositif permettant à toute personne engagée dans la vie active de valider sous forme de diplôme les compétences construites durant ses différentes expériences professionnelles. Jugé trop complexe, ce dispositif a été révisé en 2018 dans le cadre de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et a connu de nouvelles évolutions notables en 2023. Selon Anne-Marie Hinault, chargée de mission FTLV à la DGESIP du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche, cette réforme de la VAE est sous-tendue par plusieurs objectifs : redonner confiance aux candidats, sécuriser les parcours, assurer l'évolution professionnelle, apporter une réponse aux tensions de recrutement et tripler le nombre de parcours par an d'ici 2027 pour passer de 30 000 actuellement à 100 000. Ainsi cette nouvelle réforme vise à moderniser, simplifier et sécuriser le dispositif précédant.

Comment faire évoluer les compétences enseignées ?

La formation initiale et la formation continue si elles peuvent se compléter, constituent deux grands temps qui n'apportent pas les mêmes bénéfices. Contrairement à la formation continue, la formation initiale néglige souvent l'expérience de vie. C'est notamment ce qu'a pu constater Julie Thines, directrice des études Pré-Expérience à HEC Paris ayant activement participé à la mise en place d'un parcours engagement au sein de l'établissement. Dès la première année, les étudiants sont désormais invités à explorer leur individualité et à enrichir leur expérience personnelle. Pour cela un séjour à Chamonix est organisé dans le but d'effectuer des activités collectives de méta-leadership. C'est à la fois le corps et l'émotion qui sont mobilisés. D'autre part, chaque étudiant doit effectuer un minimum de 30 heures dans une association et réaliser un stage ouvrier de trois semaines. Grâce à ces différentes activité, les étudiants sont invités à gagner rapidement en maturité. La pluridisciplinarité de la formation initiale se trouve également renforcée car les disciplines de management et de data science viennent s'entremêler aux cours de psychologie, géopolitique et aux enjeux enjeux d'ESG. Par là-même, les étudiants sont plus à même de développer un regard critique sur le monde qui les entoure mais également sur leur propre monde intérieur.

Deuxième séminaire venant ouvrir l'année de L3 et le parcours engagement 2021 pour les étudiants de HEC (© Quentin Iglésis - Mountain Path)

Néanmoins pour que la formation continue trouve pleinement sa place au sein de l'enseignement supérieur, les mentalités se doivent d'évoluer. À HEC, l'incorporation des sujets ESG au sein des cours, même si elle a doublé en an, n'est que de 20%.

Tatiana Defrance, directrice générale de Polytechnique Executive Education a insisté sur le fait que dans chaque établissement la réflexion sur le continuum entre formation initiale et continue doit devenir une priorité. À l'heure actuelle la formation initiale revête une place bien plus importante que la formation continue au sein des établissements. Les mentalités et notamment la vision de la formation se doivent d'évoluer pour accorder une plus grande place à la formation continue. L'enseignant chercheur est un acteur majeur dans la reconnaissance accrue de la formation continue et peut aider à renforcer sa légitimité.

L'entrepreneuriat : une clé d'entrée pour relier formation initiale et formation continue

 Au cours de leur carrière tous les anciens élèves d'une Grande école seront entourés de start-ups. Il est donc nécessaire de donner à tous des cours de formation à l'entrepreneuriat et pas seulement à ceux qui en feront leur vocation. L'entrepreneuriat offre à chacun un nouveau jeu de compétences. Ainsi, les étudiants sont capables à la fin de leur cursus de voir les problèmes mais également de les résoudre. Thomas Houy, maître de conférences en management à Télécom Paris souligne que l'entrepreneuriat est un véhicule pédagogique puissant pour développer de nouvelles compétences et orienter les pédagogies vers un modèle de formation continue. De plus, il constitue un véritable modèle pour apprendre à apprendre et cela pour deux raisons : il permet de savoir ce qu'on ne sait pas et d'explorer des "inconnues inconnues" c'est-à-dire des choses qu'on ne sait pas ne pas savoir contrairement aux "inconnues connues" qu'on sait que l'on ignore.

Dans un contexte où il n'est plus possible de prévoir l'émergence des évènements et où les risques géopolitiques, environnementaux, sanitaires, etc. sont permanents, l'entrepreneuriat constitue une aide précieuse. Cet incertain représente une limite majeure à l'acquisition de compétences par les élèves, car les outils qu'ils ont appris à manier ont été pensés dans un monde différent. Dans cette perspective l'entrepreneuriat permet d'apporter des solutions par le biais de l'effectuation. En effet, être effectual consiste à s'intéresser davantage aux effets que l'on produit plutôt qu'au but précis que l'on recherche.

Intervention de Thomas Houy lors de la table ronde : La formation tout au long de la vie est-elle plus importante que la formation initiale ?

Compétences, connaissances, diplômes que recherchent les entreprises ?

Tour d'horizon de la formation de l'emploi et des métiers

Responsable de l'Observatoire de la formation de l'emploi et des métiers (OFEM) à la CCI Paris Île-de-France, Linda Benihaddadene a mis en évidence pendant la commission les besoins des entreprises. Tout d'abord, celles-ci ne constituent pas un ensemble homogène : leurs pratiques de recrutement et leurs besoins sont différents. Les grandes entreprises emploient ainsi davantage à bac+5 tandis que les entreprises de plus petite taille ne sont pas forcément à la recherche de diplômes. Un de leur point commun est cependant l'expérience professionnelle qui constitue une priorité. Pour une majorité d'entreprises, quelle que soit leur taille, le candidat idéal est celui qui saura s'intégrer durablement dans l'entreprise en partageant ses valeurs. A contrario l'une de leur difficultés communes est qu'elles ont du mal à identifier précisément leurs besoins en compétences; c'est pourquoi elles valorisent l'expérience, les capacités d'adaptation, etc.

Ainsi compétences, connaissances et diplômes sont toujours importants mais à des degrés divers, en fonction de la situation dans le parcours professionnel. En début de carrière, le diplôme constitue le critère le plus important car il est un signal d'employabilité notamment pour le premier emploi. Au cours de la progression de carrière, d'autres signaux prennent le pas tel que le savoir-faire caractérisé par des capacités à s'adapter et à apprendre.

L'importance de l'apprentissage

La question de la compétence est facile à concevoir mais difficile à manipuler. Néanmoins, développer des compétences peut passer par un affrontement concret aux situations de travail. À cette aune, l'environnement professionnel qu'offre le parcours en alternance est un bon moyen d'être dans cet affrontement. Par ce biais, les étudiants sont invités à se confronter rapidement au monde du travail et à développer des compétences humaines en matière de savoir-être tout en mobilisant les connaissances théoriques apprises durant leurs heures de cours. Philippe Trimborn, directeur de l'Institut des métiers et de la Relation écoles chez Orange remarque à cet égard que les bienfaits de l'alternance sont ressentis aussi bien par les étudiants que les entreprises. L'apprentissage constitue par ailleurs un lieu de dialogue entre les écoles et entreprises indispensable pour comprendre les besoins et les attentes de chacun. C'est dans cette optique que chaque année Orange recrute plus de 2 500 alternants et a noué des partenariats particuliers avec une quarantaine d'établissements. Vincent Caputo, directeur de la formation continue et de l'apprentissage à l'UTT rejoint cet avis. L'apprentissage est un axe majeur car il permet de se rapprocher de l'entreprise, d'être dans la société au milieu des hommes et de pleinement s'immerger dans le monde professionnel. La période de travail se doit d'être transformée en temps d'enseignement. Le Pass Compétences Mobilité, projet développé par l'UTT qui a récemment obtenu un financement du PIA4, ambitionne à ce titre de refonder ce dialogue majeur entre école et entreprises du territoire en mobilisant la fonction recherche de l'établissement.

Nicolas Glady estime cependant que l'enjeu est désormais d'établir un dialogue entre les professeurs promouvant un enseignement purement académique et l'apprentissage des soft skills souhaitées par les entreprises. Apprendre ne cesse pas à la sortie de l'école. Le socle de base est important et nécessaire mais il faut continuer à se former tout au long de la vie aux compétences techniques et au leadership.

La nécessité de tenir compte des attentes des jeunes diplômés

À l'heure où la responsabilité environnementale et sociétale est un enjeu majeur, les entreprises doivent fournir des efforts en termes de recrutement, notamment en tenant compte des attentes des jeunes diplômés en matière d'emploi. Le baromètre BCG-Ipsos-CGE "Talents : Qu'attendent-ils de leur emploi ?", consultation menée auprès des élèves et alumni des Grandes écoles, a mis en évidence que 71% des répondants étaient prêts à refuser un poste dans une entreprise manquant d'engagement social et environnemental tandis que 52 % se disent prêts à démissionner pour les mêmes raisons. D'autre part, le manque d'équilibre entre vie professionnelle et personnelle est la deuxième raison qui amènerait les répondants à démissionner. Autant de paramètres que les entreprises doivent désormais prendre en compte.

Intervention de Linda Benihaddadene lors de la seconde table ronde : Compétences, connaissances, diplômes que recherchent les entreprises ?

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