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Le stage: main d’oeuvre bon marché ou levier à l’embauche ?

Alors que la législation s’apprête à évoluer à nouveau et que le cadre se fait…
Publié le 22 mai 2014
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Alors que la législation s’apprête à évoluer à nouveau et que le cadre se fait de plus en plus précis et restrictif, le stage n’a jamais autant fait parler de lui dans la presse que ces dernières semaines.
Certains articles ont eu tendance à faire du stage la « bête à abattre », mettant en avant les abus en tout genre et faisant d’exceptions une généralité.
Si les abus existent, il ne faut pas oublier le nombre d’étudiants des Grandes écoles à qui ces expériences ont pu apporter compétences et savoir-être en entreprise, atouts indispensables pour conduire à l’emploi sur un marché tendu.

Focus sur le stage en entreprise.
Des abus indéniables …
Quelle école n’a jamais reçu l’appel d’une entreprise à la recherche d’un stagiaire pour remplacer une salariée en congé maternité ? Combien de stagiaires ont-ils été recrutés puis formés par le stagiaire précédent, et ce même depuis la mise en place par la loi Cherpion en 2011 du délai de carence entre 2 stages ? Nous avons tous été confrontés un jour au dilemme : « mon étudiant me dit qu’il est heureux d’avoir de nombreuses responsabilités car l’entreprise ne travaille qu’avec des stagiaires … moi qui sais que ce n’est pas cela un « bon » stage, dois-je le sortir de sa structure d’accueil ? » Et tout cela sans parler de l’offre de stage de 12 mois non gratifiée à Londres ou du stagiaire travaillant 50h par semaine (officiellement 35h) pour 436,05€ par mois à Paris…

Certes, des exemples d’abus, nous en avons tous en tête ! En étant sur le terrain, nous ne pouvons pas le nier, nous voyons parfois passer de drôles de choses… Souvent involontaires, par manque d’information sur les pratiques ou la législation, parfois malhonnêtes, avec ce chantage simple mais insidieux : « si tu ne te plies pas, tu ne valides pas ».

… mais qui restent des exceptions !

Fort heureusement, si ces exemples marquent les esprits, ils n’en restent pas moins très largement minoritaires. Alors que le rapport de 2012 du Conseil économique, social et environnemental estime le nombre de stagiaires à 1,6 millions (avec une évolution de +165% en 6 ans), la CGT dénombre de son côté 100.000 stages abusifs, soit près de 94% de stages bénéfiques à toutes les parties !
Il ne faut pas non plus oublier que nos écoles, qui ont fait de l’application des enseignements en entreprise leur cheval de bataille depuis de nombreuses années, prennent leur rôle d’encadrement très au sérieux et restent vigilantes quant au bon déroulement des stages et au respect des droits de leurs étudiants.

Le stage : visa pour un emploi choisi

Si les stages se sont développés dans nos formations, et tendent désormais à être présents dans les cursus universitaires, ce n’est pas pour créer un vivier de main d’œuvre bon marché, mais bien pour préparer au mieux nos étudiants à accéder dans les meilleures conditions possibles au marché de l’emploi et les accompagner dans leur choix de métier. Car c’est bien de cela qu’il s’agit avant toute chose : l’assurance et la « ré-assurance » de construire le bon projet professionnel !
Nombre d’étudiants arrivent dans nos écoles avec cette question en suspens : à quel métier suis-je destiné ? Et nous voyons bien qu’au-delà des cours, des serious games et des ateliers de développement personnel et professionnel, rien ne vaut la mise en pratique de tous ces enseignements dans un contexte réel : tester son futur métier, se rendre compte par soi-même que tel environnement de travail convient mieux que tel autre, que ce métier qui paraissait exaltant est ennuyeux au quotidien, mais que tel autre, découvert lors d’un stage pourrait être intéressant… Avoir le choix, multiplier les expériences et avoir le droit de se tromper, encore un peu, et sans conséquence dramatique sur l’avenir !
Une fois le projet professionnel élaboré, les stages ouvrent la voie royale vers l’emploi : acquisition des compétences, meilleure connaissance du secteur et de ses enjeux, adoption des savoir-être liés au milieu, etc… Bref, ainsi préparé, le jeune diplômé a en main tous les atouts pour décrocher l’emploi qu’il a choisi et dans lequel il sait qu’il s’épanouira.
Le stage peut même mettre le pied à l’étrier encore plus rapidement ! L’Association pour l’emploi des cadres estime à 20% les jeunes diplômés ayant décroché leur 1er emploi sur leur lieu de stage.

La proposition de loi sur les stages qui sera étudiée au Sénat fin avril vise à limiter les abus et à donner des droits complémentaires aux stagiaires. Même si certains articles proposés semblent difficiles à mettre en œuvre, l’objectif est louable. Reste à voir si cette loi qui cible principalement les 6% de « mauvais » stages ne sera pas au détriment des 94% d’expériences positives tant pour l’étudiant que pour l’organisme d’accueil. Une de ses conséquences pourrait être la disparition des « années de césure » pratiquées par nos écoles… Ne risque-t-on pas de priver nos étudiants d’un apprentissage professionnel et d’un enrichissement personnel inégalables ?

 

Cécile BASTIEN
Responsable des Stages
Groupe ESC Troyes

 

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