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Les mathématiques : outil indispensable en finance – par A. Vanhems & H. Boco (ESC Toulouse)

Et si la crise actuelle signifiait l’échec des mathématiques financières ? En effet, dans les…
Publié le 22 février 2012
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Et si la crise actuelle signifiait l’échec des mathématiques financières ? En effet, dans les deux dernières décennies, l’utilisation de modèles mathématiques a été générale dans les salles de marché et n’a visiblement pas permis d’éviter leur effondrement…. Quels sont donc ces modèles mathématiques utilisés en finance et plus généralement comment ont-ils gagné une place centrale dans toutes les sciences sociales ? A quoi servent-ils et quelles sont leurs limites ?

Modèle et réalité

Le mot « modèle » vient du Latin modellus qui signifie mesure. Un modèle mathématique est donc une représentation d’un phénomène financier, sociologique ou physique. Cette représentation est basée sur un certain nombre d’hypothèses arbitraires et simplificatrices, qui ne sont pas forcément validées par la réalité. Ainsi, les astronomes utilisèrent pendant treize siècles le système de Ptolémée (IIe siècle après JC), qui supposait la terre au centre de l’univers, pour prévoir, avec succès, les éclipses et la course des astres…

Les mathématiques ont permis à toutes les autres disciplines (littérature, sociologie, économie, médecine, météorologie etc.) de réaliser de très grands progrès en intégrant des hypothèses de plus en plus complexes. En particulier, grâce aux probabilités et au calcul stochastique, les métiers de la finance et de l’assurance ont pu développer de nouveaux produits qui répondent aux exigences toujours croissantes des acteurs économiques en termes de profit et de contrôle des risques. Les méthodes d’analyse statistique et l’essor du calcul informatique offrent aussi les moyens d’extraire de l’information à partir des données disponibles et d’estimer l’écart entre modèle et réalité.

Mathématiques et sciences sociales

Lors de l’élection présidentielle américaine de 1936, la revue Literary Digest, à l’aide d’un annuaire téléphonique, sonda les préférences de dix millions de personnes. Elle annonça alors une large victoire d’Alfred Landon sur Franklin Roosevelt. De son côté, l’institut Gallup prédit le résultat inverse à partir d’un sondage réalisé auprès de seulement quelques milliers de personnes, mais suivant la méthode scientifique des quotas. C’est ainsi que la victoire de Roosevelt décida du succès des statistiques auprès de toutes les disciplines sociales ! Autre illustration : les statistiques, en recensant la récurrence et la position des mots dans un texte littéraire, permettent d’en déterminer la date de composition et l’auteur.

L’économie qui s’intéresse à la production et à l’allocation optimale des ressources et des profits dans une société, utilise aussi abondamment les mathématiques pour atteindre cet objectif. Dans cette perspective, une branche entière de l’économie s’est développée : l’économétrie. Le prix Nobel d’économie a d’ailleurs, à plusieurs reprises, récompensé des travaux d’économètres, comme Daniel Mc Fadden et James Heckman en 2000 ou Robert Engle et Clive Granger en 2003. Les techniques d’économétrie s’appliquent aussi à d’autres disciplines des sciences sociales, comme le marketing avec les études de marché et les modèles d’équations structurelles, ou l’étude sociologique et psychologique des comportements.

Mathématiques et gestion des risques

L’assurance est un autre cadre d’application riche pour les mathématiques. Les mathématiques actuarielles sont nées avec les tables de mortalité, et le calcul de rentes actualisées, c’est-à-dire une conception déterministe du risque. Toutefois, la plupart des éléments utilisés dans l’approche moderne des mathématiques de l’assurance reposent sur les outils développés par la théorie des probabilités : la survenance d’un sinistre est un événement aléatoire, ainsi que, bien souvent, son coût. Le risque naît donc de l’aléa et les techniques de calcul actuariel peuvent être vues comme des applications de résultats probabilistes, avec l’usage de l’espérance mathématique pour calculer le prix du risque, l’utilisation de la loi des grands nombres pour illustrer le principe de mutualisation des risques, ou encore la mesure de risque de faillite.

Enfin, à partir des années 50, la finance s’est développée comme une branche séparée de l’économie avec l’apparition des premiers modèles d’évaluations (le Modèle d’évaluation des actifs financiers – le MEDAF- ou les modèles multifacteurs comme l’Arbitrage Pricing Theory – APT). La déréglementation et la désintermédiation des marchés financiers ont ensuite fait surgir de nouveaux risques sur toutes les classes d’actifs (devises, actions, obligations, etc.). Pour se couvrir, les acteurs financiers développent des produits dérivés (options d’achat, de vente, etc.). Le calcul stochastique, qui est la modélisation de l’aléa qui pèse sur l’évolution des cours futurs des actifs, permet d’évaluer le prix de ces produits dérivés. Le modèle de Black Scholes (1973) a été le premier à déterminer la valeur des options d’achat. Plus généralement, son succès ouvrit tout grand les portes des salles de marché aux ingénieurs et aux mathématiciens. Dans ce contexte, les grandes écoles, qu’elles soient d’ingénieurs ou de commerce, ont multiplié les filières de formation en finance pour répondre aux besoins des salles de marché. Les mathématiques financières sont même devenues une spécialité française, la City employant 150 000 Français soit 20 % de ses effectifs !

Quel avenir pour les mathématiques financières ?

Ainsi, l’utilisation des outils mathématiques pour une meilleure gestion et appréciation du risque constitue une opportunité d’innovation et une source de création de richesse indéniable. Le danger vient lorsque la complexité des modèles occulte le fait qu’ils sont basés sur des hypothèses trop simplificatrices et que le modélisateur ignore les logiques économiques fondamentales.

Il nous semble donc nécessaire de former des futurs responsables et des décideurs à même de comprendre et de savoir utiliser les modèles mathématiques mais possédant aussi une connaissance empirique et pragmatique des marchés financiers.

 

Anne Vanhems
Enseignant chercheur, professeur permanent de Statistiques et Econométrie
à l’ESC Toulouse – Chercheur associé à TSE

Hervé Boco

Enseignant chercheur, professeur permanent de Mathématiques Financières
à l’ESC Toulouse

A propos de Toulouse Business School

Fondé en 1903 par la Chambre de commerce et d’industrie de Toulouse, le Groupe ESC Toulouse dispose aujourd’hui de trois campus (Toulouse, Barcelone et Casablanca) et d’une antenne à Paris. Il est structuré autour de six cursus (programme Grande École, programme bachelor, Mastères Spécialisés, programmes MBA, Capitolis et le CPA pour la formation continue) visant une même finalité : former les pilotes du changement via de nombreux parcours personnalisés. Les formations sont essentiellement axées sur les RH, le marketing, la finance, l’expertise comptable, le conseil et l’audit, mais aussi le domaine culturel, l’humanitaire, l’entrepreneuriat…

Toulouse Business School est l’une des rares écoles dotées de la triple accréditation internationale EQUIS / AMBA / AACSB.

Ouvert sur le monde, le Groupe a signé plus de 145 accords d’échanges avec des universités réparties sur tous les continents. Près de 80 nationalités sont représentées sur les différents campus.

Le pôle Économie/Finance propose des programmes spécialisés de haut niveau académique et professionnel dédiés aux étudiants qui s’orientent vers les métiers de la finance dans les secteurs de la banque, de l’assurance, des sociétés de gestion et du conseil :

  • Au sein du programme Grande École, le pôle anime le parcours d’excellence « Advanced Finance Program », les options professionnelles « Banking and Corporate Finance » et « Banking and Financial Markets » sur le campus de Toulouse ainsi que l’option « Financial Management » sur le campus de Barcelone. Le pôle est également en charge de l’option « Sustainable Business » sur le campus de Toulouse.
  • Le Mastère Spécialisé « Banque et ingénierie ginancière » inscrit au Répertoire national de la certification professionnelle (au niveau 1), forme depuis 20 ans des experts de haut niveau dans tous les métiers de la banque et de la finance.
  • Les Mastères Spécialisés « Gestion de patrimoine » et « Ingénierie et modèles de la finance » (en partenariat avec ISAE-SUPAERO) couvrent des domaines de haute spécialisation de la finance.
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