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Servir l’intérêt général et répondre à l’attente des nouvelles générations de diplômés : l’exemple du repositionnement de l’ENA et de son association d’alumni

L’ère des changements sur le marché du travail Quoi de neuf en cette rentrée 2022 ?…
Publié le 30 septembre 2022
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L’ère des changements sur le marché du travail

Quoi de neuf en cette rentrée 2022 ? Bruno Latour, lors de la publication de son questionnaire en mars 2020, nous avait prévenus. En sortie de crise COVID-19, nous serions obligés de nous poser, individuellement et collectivement, la question : Quelles sont les activités maintenant suspendues dont vous souhaiteriez qu’elles se développent/reprennent ou celles qui devraient être inventées en remplacement ?

Dans un premier temps, à court terme, près d’un tiers des jeunes ont vu leurs offres annulées ou décalées en raison de la crise du COVID-19. Pour les jeunes diplômés, jusqu’à 40% (source : enquête JobTeaser auprès de 173 entreprises et 5 606 jeunes de 18-25 ans en France., décembre 2020). Mais le fait le plus notable avec des conséquences à moyen/long terme est celui des changements d’orientation professionnelle ou universitaire des jeunes au cours de la période récente. Les chiffres sont impressionnants : 25% des 18-24 ans et 32% des 25-39 ans ont changé d’orientation professionnelle (source : enquête Et maintenant pour Arte/France Culture, juillet 2022).

La pandémie, et le confinement ayant suivi, ont donc accéléré les mutations en cours du marché du travail, et pour certains observateurs, la crise du sens du travail.

Sans doute que les jeunes, en avance sur le reste de la société, ont pris en effet conscience que nous sommes entrés, avec fin 2022/début 2023 un moment de bascule très profond, dans un nouveau monde, avec une réorganisation des priorités.

 

Le service de l’intérêt général, comme élément d’attractivité à l’égard des jeunes générations

Pendant plusieurs décennies, le mot d’ordre politique était à la réduction du nombre de fonctionnaires.

Mais, quand nous fûmes au cœur de la crise COVID-19, a émergé la notion de « métiers essentiels » (ou « première ligne », à l’opposé des « bullshit jobs », écrit par l’anthropologue américain David Graeber) et les Français ont vu que les fonctionnaires mobilisés pour assurer la continuité des services publics, et ainsi protéger les plus fragiles, répondaient présents.

Les fonctionnaires eux-mêmes ont gagné en estime de soi, et, en sortie de crise, le Gouvernement a changé de discours rappelant qu’il fallait réinvestir dans les services publics car les fonctionnaires étaient au cœur des mutations que vit notre société (transitions écologique, démographique, technologique et numérique) et qu’ils étaient les premiers acteurs, garants du projet d’une société résiliente.

Certes, il n’est plus possible pour l’Etat employeur de miser sur le seul argument vocationnel pour attirer les talents. Mais, à condition de simplifier les modes de recrutement et de proposer des dynamiques de carrière évolutives tout en respectant le cadre statutaire, l’engagement des fonctionnaires pour quelque chose de plus grand que soi qui s’appelle l’intérêt général devrait attirer les plus entreprenants des Français vers la sphère publique, à commencer par les jeunes diplômés en quête de sens.

 

Une nouvelle organisation de la haute fonction publique pour accompagner les grandes mutations sociétales

L’Association a été créée le 7 novembre 1947, par la première promotion de l’Ecole nationale d’administration (ENA), la promotion France combattante. L’Ecole avait été créée en 1945 pour contribuer au redressement de la France en même temps que pour démocratiser la haute fonction publique (vivier de recrutement des grands corps comme des administrateurs civils, nouveau cadre interministériel). « Une école d’administration pour fournir des cadres parmi lesquels le Gouvernement choisira ceux qui occuperont les emplois d’autorité pour lesquels l’administration rejoint le politique. Ces futurs fonctionnaires devront avoir les qualités d’initiative, d’énergie, et de décision, qu’exigent ces emplois. » (Actualités françaises, 4 janvier 1946)

Grâce à la réussite des premières promotions et le soutien constant de ses fondateurs (le Général de Gaulle, Michel Debré…), elle est devenue rapidement dans l’après-guerre, le symbole de la modernisation de l’Etat et plus généralement de la France. Pas de France moderne, sans un Etat moderne, ni une administration moderne.

Le principe de mutabilité (ou d’adaptabilité) est le plus ancien des principes d’organisation des services publics. Il s’applique également à l’Ecole et à l’Association des anciens élèves. L’ENA a connu avant 2017 plus de vingt-cinq réformes de son organisation ou de sa scolarité.

Force est de constater que la réforme de l’ENA et de la haute fonction publique, initiée par le discours du Président de la République le 8 avril 2021, puis l’ordonnance du 2 juin 2021, dans le prolongement de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019, n’est pas une énième réforme paramétrique, mais bien une réforme systémique, avec sur certains aspects, un changement de paradigme (Marcel Pochard, «La réforme des hauts fonctionnaires ne mérite ni blâme ni éloge sans nuances», tribune dans le Figaro, le 1er juin 2022). L’ambition est d’accompagner les transformations de la France en s’appuyant sur de nouvelles générations de hauts fonctionnaires.

Les cadres supérieurs de l’État sont désormais, depuis le 1er janvier 2022, formés au sein de l’INSP (Institut national du service public), succédant à l’ENA.  L’ordonnance du 2 juin 2021 voit aussi le droit à la carrière des hauts fonctionnaires, au sein de leur corps d’affection à la sortie de l’Ecole, à commencer par les anciens élèves de l’ENA, s’estomper, un peu plus, au profit d’un droit au parcours professionnel, avec la promotion des mobilités y compris allers-retours entre le public et le privé.

 

Une association résolument tournée vers l’avenir

Comme la mutabilité, la continuité est un autre principe d’organisation des services publics. Etant donné son histoire et celle de l’Ecole, sa raison d’être rappelée ci-dessus, l’Association des anciens élèves de l’ENA (11 000 alumni dont 3 800 anciens élèves étrangers issus de 137 pays différents) ne pouvait opter pour le statu-quo.

La seule voie porteuse de sens était d’aller de l’avant. Lors de sa dernière assemblée générale le 29 juin 2022, elle a décidé, à la quasi-unanimité des membres présents ou représentés, de changer sa gouvernance, ses statuts, son règlement intérieur, mais aussi sa marque et sa charte de communication, et d’accueillir les anciens.

En choisissant la marque « SERVIR », et l’idée de générations successives au service de l’Etat, partageant les mêmes valeurs et le même attachement au service public, suite à un travail interne approfondi avec l’aide de l’agence Havas, l’Association a fait le choix d’un positionnement fort, résolument tourné vers l’avenir, en phase avec les enjeux de l’Etat au XXIème siècle.

Pour plus d’information sur l’Ecole et l’Association des alumni : https://www.serviralumni.com

 

Gilles Duthil,
Haut-fonctionnaire, secrétaire général de SERVIR – Alumni de l’ENA et de l’INSP
animateur du GT Alumni de la CGE

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